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Leopold Stokowski en Allemagne

De la carrière de , on connaît surtout la période américaine documentée à profusion par les innombrables 78 tours et microsillons qu'il a gravés avec divers orchestres : Philadelphia Orchestra en tout premier lieu, All American Youth Orchestra, Symphony Orchestra, Hollywood Bowl Symphony Orchestra, Houston Symphony Orchestra, NBC Symphony Orchestra, New York Philharmonic Orchestra, American Symphony Orchestra… Au crépuscule de sa vie, il vécut en Angleterre où il enregistra ses derniers disques pour CBS-Sony qui lui offrit, à l'âge de 94 ans, un nouveau et surprenant contrat d'une durée de six ans !

Toutefois le vieux continent n'était pas inconnu de Stokowski : fin des années 50, le label Capitol nous a laissé des témoignages de gravures (rééditées chez EMI-Warner Icon) avec l'Orchestre National de la Radiodiffusion Française et l'Orchestre Philharmonique de Berlin avec lequel il grava deux ballets de Stravinsky ! Par ailleurs, durant cette même décennie, la Deutsche Grammophon mit en valeur plusieurs compositeurs allemands contemporains et leurs créations dans sa série « Musica Nova » : on découvrait ainsi au disque des œuvres passionnantes dont certaines étaient dirigées par leurs compositeurs respectifs et d'autres par des chefs très remarquables tels que Hans Rosbaud ou Ferenc Fricsay. Le grand chef hongrois enregistra notamment en octobre 1950 les Variations pour orchestre sur un thème de Paganini de (1903-1975), créées en 1947, et en septembre 1955 la Suite française d'après Rameau pour grand orchestre (1949) de (1901-1983) dont les mouvements sont : Le Rappel des Oiseaux, Gigue en Rondeau, Les tendres Plaintes, La Vénitienne, Les Tourbillons.

Or, la coincidence est étonnante, car c'est précisément ces deux œuvres qui sont au programme du premier des deux CDs sous la baguette de Stokowski, enregistrées respectivement le 6 juin 1954 et le 15 mai 1955 à Baden-Baden, avec un orchestre magnifiquement préparé par Hans Rosbaud. Avec son exubérance coutumière, Stokowski aborde ces pages de nos jours plutôt oubliées, de manière instinctive et en grand connaisseur de la musique de son temps à laquelle il était rompu. Nous sommes en présence d'exécutions sans doute plus globales et moins fouillées que celles de Ferenc Fricsay plus précis, plus méticuleux et rigoureux dans sa démarche : ce sont deux conceptions complémentaires tout aussi valables, correspondant à chacune de ces fortes personnalités. En tout cas, quel bonheur de pouvoir enfin disposer de deux visions aussi prestigieuses que celles-là de ces deux œuvres rarement jouées, d'autant que Stokowski reçut certainement l'aval des deux compositeurs présents.

Le mini Concerto pour batterie et petit orchestre op. 109 (1930) de (8 min 40 !), dédié à Paul Collaer, est un petit bijou nous présentant le compositeur provençal sous son meilleur jour, net et concis, loin de ses errements prolixes et bavards dont on lui a souvent fait le reproche.

Les autres œuvres ici présentes, de Prokofiev (trois extraits du ballet Roméo et Juliette choisis par Stokowski), Wagner, Moussorgski et Tchaïkovski sont autant de « chevaux de bataille » que le chef a maintes et maintes fois confiés au concert et au disque, et souvent dans des conditions sonores plus convaincantes (la Symphonie n°5 en mi mineur de Tchaïkovski est ici bien trop filtrée !) Ce double CD Hänssler Classic est donc surtout précieux pour les œuvres de Blacher, Egk et Milhaud qui, à notre connaissance, n'ont pas été enregistrées commercialement par Stokowski et ses éditeurs habituels.

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