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Radu Lupu et Daniel Barenboïm à la salle Pleyel

On pourrait penser que le jeu de Radu Lupu n'est pas à son avantage dans le répertoire concertant. Surtout lorsqu'il se refuse à tout brillant dans une salle de la dimension de Pleyel. Ainsi, dans ce quatrième Concerto de Beethoven, la fin du premier mouvement sonnait-elle un peu éteinte, tout comme les cadences. Pourtant, il n'y avait là ni faiblesse de l'attaque, ni défaut de puissance.

Radu Lupu sait faire parler des passages que tant d'autres tricotent. Et la constance de sa manière, qui culminait évidemment dans le second mouvement, donnait à ce concerto une poésie romantique admirable. L'entrée du piano, dûment « dolce », ne pouvait pas être plus simple et plus prenante. Les ralentis qui permettaient au pianiste de donner la parole à l'orchestre sont en revanche une singularité dont on peut discuter les mérites. La se montrait en tout cas au niveau d'un tel interlocuteur, et malgré l'opposition apparente entre le piano rêveur et les tutti énergiques, une véritable harmonie régnait tout au long de l'œuvre. Il est vrai aussi que l'orchestre veillait à modérer son volume, mais pas son mordant, pour préserver le soliste. Une belle réussite.

Une symphonie d'Elgar à Paris, cela tient du miracle. Quelle œuvre attachante, pourtant ! Certes, l'ombre de Brahms et de Strauss cache parfois la sincérité, et le ton a tendance à s'enfler jusqu'à une pompe typiquement britannique. Ce concert montrait néanmoins la Symphonie op. 63 sous un jour très favorable. Peut-être, au moment où l'enregistrement paraît chez Decca, le chef aurait-il pu se méfier davantage de la puissance des cuivres, auxquels, dans les conditions du concert, seules les cordes et les percussions pouvaient résister. Heureusement, n'oubliait pas l'effet libérateur des exaspérations sonores, débusquant aussi les angoisses et les doutes. L'impressionnant Rondo offrait une modernité de texture qui ne correspond pas à l'idée qu'on se fait en général d'Elgar. Autres instants mémorables, la conclusion du dernier mouvement, et la grandiose marche funèbre (second mouvement), associée dès la création au roi Édouard VII, qui venait de mourir. Une éloquente défense pour un compositeur qui n'est jamais parvenu à se faire comprendre dans notre pays.

Crédit photographique : © Gettyimages

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