C'est à un passionnant périple musical griegien auquel nous convie le label aux petits prix, Naxos. Cet éditeur nous emmène en voyage aux côtés d'un compositeur plutôt connu et apprécié par ses nombreuses miniatures pour piano et ses chansons, mais dont on découvre ou confirme les très belles qualités d'orchestrateur, même si ses sources populaires demeurent souvent les mêmes.
Avec ce coffret de huit CD, il serait illusoire, voire naïf, d'affirmer que les nombreuses prestations proposées offrent une qualité créatrice (Grieg) et interprétative (le chef Bjarte Engeset) constamment inégalables. Pourtant cette somme remarquable, en tout cas exceptionnelle, nous paraît idéale pour cheminer en toute sécurité dans l'univers dansant et romantique d'Edvard Grieg. Disons-le directement cette intégrale ne démérite nullement face à celle réalisée par Ole Kristian Ruud avec l'Orchestre philharmonique de Bergen chez BIS. Elle surpasse seulement de peu le travail en cours effectué par Eivind Aadland avec l'Orchestre symphonique de la WDR de Cologne (Audite). Les deux orchestres impliqués (Orchestre symphonique de Malmö et Orchestre national royal écossais), le pianiste du fameux Concerto pour piano en la mineur, op. 16 (Havard Gimse) et les autres intervenants, des chanteurs scandinaves essentiellement, concourent à produire des enregistrements de très haut niveau, fidèles à la lettre et à l'esprit du Maître de Bergen. Une recherche mélodique toujours excellente et inventive, souvent des plus flatteuses aux oreilles, des choix harmoniques pas obligatoirement fades et insipides, mais constamment justifiés à son discours délicat, souvent tonique et remuant parfois dominent cette musique. Le Concerto en la mineur reçoit un traitement parfait et traditionnel (au meilleur sens du terme), soucieux de ne pas s'éloigner des choix esthétiques initiaux du compositeur bien ancrés dans sa musique de terroir teintés de sa formation reçue au Conservatoire de Leipzig et de l'enseignement dispensé par Niels Gade à Copenhague, lui-même un très proche de Felix Mendelssohn.
Les deux Suites pour orchestre de Peer Gynt, mais également l'intégrale de la copieuse musique de scène, nous plongent dans un univers richement coloré et changeant, héritier du legs folklorique norvégien mais pas seulement, certaines pages abandonnant pour un temps ces climats débonnaires, pacifiques, paisibles qui lui sont systématiquement accolés. Les œuvres invitant la voix (avec orchestre) rappellent l'attrait permanent de Grieg pour ce merveilleux « instrument » et dont son épouse, Nina, soprano renommée, défendit les nombreuses chansons pour voix seule et piano. Un ensemble hautement recommandable capable de conforter les étiquettes mais aussi d'infirmer toute tentation de qualifier l'œuvre de Grieg d'insignifiante. Un destin emblématique et une musique proche de l'âme du national-romantisme norvégien et plus largement scandinave.