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Karajan et la musique chorale

Ce beau coffret de l'Édition Karajan officielle remasterisée par Warner Classics rassemble trois chefs-d'œuvre des périodes classique et romantique, dans la vision d'un de la pleine maturité des années 70 : l'oratorio Les Saisons Hob.XXI.3 de , la Missa Solemnis en ré majeur op. 123 de , et le Requiem Allemand op. 45 de .

Pour EMI, l'illustre maestro autrichien a peu enregistré Haydn : Les Saisons (1972) et les Symphonies n°83 « La Poule », n°101 « L'Horloge » et n°104 « Londres » (1971 et 1975). C'est donc avec plaisir que nous accueillons sa version ici présente des Saisons (1972), réalisée en novembre 1972 suite à une série de concerts publics les mettant à l'honneur. L'enregistrement fut à l'origine mal reçu en raison d'un médiocre mixage sonore destiné au microsillon. La question ne se pose plus pour cette excellente réédition en CD qui aurait ravi le chef d'orchestre par sa clarté et sa transparence permettant à l'auditeur d'enfin savourer toutes les splendeurs de cette œuvre merveilleuse, sans les distractions d'ordre purement technique.

En 1966, Karajan nous avait déjà gratifié d'une exceptionnelle gravure de La Création (DG 4497612), et ses Saisons sont à peine moins somptueuses, les différences se situant surtout au niveau des solistes et des chœurs, le Chœur de l'Opéra de Berlin, bien que de très haut niveau, ne pouvant prétendre à la même perfection que celui du Singverein de Vienne. Dans l'une et l'autre œuvre, Karajan ne s'embarrasse guère de considérations liées à la mode de la prétendue « authenticité » des baroqueux : il ne l'a d'ailleurs jamais revendiquée, et devant l'exceptionnelle qualité instrumentale de ses musiciens, la question ne se pose même pas.

Beethoven et Brahms ont toujours été au cœur des affinités et du répertoire de Karajan, et ni la Missa Solemnis, ni le Requiem Allemand ne font exception. Deux versions EMI de la Missa Solemnis op. 123 de Beethoven (septembre 1958 et septembre 1974) encadrent celle de février 1966 chez DG. La gravure EMI de 1958 (Warner Classics 0825646336296) est illuminée par la présence d'Elisabeth Schwarzkopf et Christa Ludwig, tandis que les deux autres bénéficient de la voix pure de , avec de plus la participation de l'admirable pour EMI de 1974 ici présente. Comme cette dernière bénéficie de la plus impeccable prestation et mise en place des Berliner Philharmoniker, malgré le violon solo quelque peu moins inspiré de Thomas Brandis que celui de Michel Schwalbé, elle est celle à préférer, le chœur du Singverein de Vienne étant exceptionnel dans les trois cas.

En octobre 1947, Karajan était particulièrement en état de grâce pour la gravure 78 tours de son « premier » Requiem Allemand de Brahms chez la Columbia anglaise (Warner Classics 0825646336296). Les légendaires Elisabeth Schwarzkopf et Hans Hotter étaient de l'aventure – car c'en était une : 20 faces 78 tours ! – mais également l'incomparable chœur du Singverein de Vienne qui, à cette occasion, nommèrent Karajan chef à vie de leur association, ce dont le maestro fut reconnaissant toute son existence. Surclasser cette version était, même de la part de Karajan, quasi mission impossible, sauf évidemment sur un point, la qualité de la prise de son. Ici également, deux versions EMI encadrent une version DG (4636612) enregistrée en mai 1964 avec une parvenant à égaler Elisabeth Schwarzkopf, sans que Eberhard Waechter en fasse de même vis-à-vis de Hans Hotter ; la prise de son, sensationnelle pour l'époque, était toutefois gâchée par des timbales trop en avant, dont le rôle soliste était une erreur et ne s'imposait donc pas. La version EMI d'octobre 1976, reprise dans ce coffret, remédie à cela, et apporte l'atout supplémentaire de la présence de , toujours admirable en ce domaine. Cette version parfaitement équilibrée fut suivie en mai 1983 d'un nouvel enregistrement DG dont la nécessité ne se faisait aucunement sentir, malgré la présence de Barbara Hendricks.

Cet album de la série Karajan officielle de Warner Classics est donc pratiquement idéal dans le regroupement de ces trois chefs-d'œuvre de la musique chorale, et à plus forte raison qu'ils sont restitués en une somptuosité sonore nous semblant insurpassable.

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