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Tanzolymp à Berlin, la pluralité d’un concours de danse

Le plus grand concours de danse d'Allemagne a soufflé cette année sa douzième bougie. Et Tanzolymp prend de l'ampleur à vitesse grand V !

Oleksi Bessmertni, directeur du concours et ex-danseur du Staatsoper de Berlin, a lui-même connu les compétitions : « Les concours de ma jeunesse étaient plus déloyaux car ils ne mélangeaient pas les genres ! » La force de cette épreuve réside en effet dans sa pluralité des catégories (danses classique, néo-classique, contemporaine, jazz et folklorique), la diversité des nationalités (près d'une quarantaine !) et l'immense panel des âges des concurrents (8-18 ans). De plus, les danseurs et danseuses provenant d'écoles publiques comme privées concourent, certes, séparément, mais sont évalués par le même jury et peuvent participer équitablement aux workshops proposés. Et chaque année de jeunes éléments issus du privé remportent des bourses pour aller étudier dans les plus grands centres de formation publiques européens : une aubaine inespérée !

Sous l'égide du nouveau directeur du Staatsballett et chorégraphe espagnol, , et sous la présidence d'honneur du grand Vladimir Vasiliev, le jury était notamment composé de , le directeur artistique du Bolchoï, mais aussi du génialissime Victor Ullate, et surtout, la France, mère créatrice de la danse classique, était également représentée : l'Étoile de l'Opéra de Paris , tout fraîchement à la retraite, nous a fait l'honneur de se déplacer à Berlin !
L'attaché culturel de l'Ambassade de France à Berlin nous a fait, quant à lui, l'honneur d'écrire un mot d'accueil dans le programme, aux côtés de ses homologues russe, biélorusse, ukrainien, portugais et brésilien. Un texte portant sur la danse d'une platitude inégalable, qui plus est en français (et non relu !), alors que tous les autres ambassadeurs ont eu la décence d'opter pour la langue du pays dans lequel ils vivent, s'expriment, s'intègrent…Passons.

Nouveauté cette année, les deux parties du gala ont débuté par des Pas de deux de jeunes danseurs professionnels invités pour l'occasion. et Semion Chudin, étoiles du Bolchoï, entament les festivités perruqués, avec La Belle au bois dormant. On retiendra de cette classique prestation le manège de jetés de l'athlétique Semion Chudin. En second partie de spectacle, (Staatsballett de Berlin) et Oleksandr Stoianov (Ballet National d'Ukraine) ont dansé la Pas de deux du Corsaire : phénoménal, surtout pour Monsieur. Place aux lauréats du concours et au Brésilien Yago Guerra, divin charmeur dans Harlequinade. Une médaille d'or indéniablement méritée surtout quand on sait que le danseur est issu d'une école de formation privée : ce jeune garçon est à suivre de très près ! Notez que cette édition a prouvé une nouvelle fois combien les écoles privées délivrent des danseurs et danseuses étonnants, à la technicité pointue et à l'expression tout aussi travaillée qu'un produit issu d'un Conservatoire ou d'une autre école de formation nationale. Le petit Mexicain David Perez Ensico, la classieuse Américaine Katherine Barkman et la pirouettante Coréenne Danbi Kim en sont la preuve parfaite. Cette dernière nous a présenté une variation d'Odile stupéfiante de précision dans ses tours et dans ses attitudes, même si la jeune demoiselle doit encore mûrir l'ambiguë noirceur de son personnage.

Berlin était cette année extrêmement représenté avec de nombreux élèves (allemands mais surtout internationaux) de la Staatliche Ballettschule, qui ont remporté beaucoup de prix. Elena Iseki notamment, dans la variation de Coppélia, a exposé un travail de bas de jambes pointilleux et une jolie interprétation de Swanilda. Niveau contemporain, le Brésil occupait comme souvent les premières places dans le palmarès des chorégraphies de groupe (Ensemble Corpo Livre), mais aussi dans les solos (Renan de Olivera). Le Conservatoire de Lisbonne nous a offert d'agréables surprises comme cette fluide danseuse Maria Fonseca et la Belgique, sous l'égide de Nadia Deferm en tant que membre du jury, nous a proposé un duo (Lara Fransen et Francesco Nel Lo) pour le moins électrisant. La gloire (méritée !) revient comme toujours aux danseurs coréens, cependant inférieurs en nombre par rapport aux autres éditions. Une médaille d'or ou d'argent permettant aux lauréats d'échapper au service militaire, beaucoup (trop) de danseurs coréens prennent leur billet pour Berlin. Monsieur Bessmertni a souhaité que cela cesse, rappelant les valeurs apolitiques du concours.

Enfin, en danse folklorique, exception faite de la prestation originale des Brésiliennes du Sheila´s Ballet donnant dans le step dancing irlandais (qui fait s'aligner les danseuses pour effectuer les mêmes mouvements en rythme), les ensembles russes ont tout raflé. L'Ensemble Zhemchuzheni Peterburga et ses petits zébulons au téléphone, affublés de costumes verts et roses flashy, ont enthousiasmé le public. Une expressivité à fleur de peau. Idem pour l‘Ensemble Exiton qui nous a plongés au cœur d'une suave fable évoquant le coucher. Le tout étrangement bercé par l'hymne anglais, God Save the Queen. Et que penser de l'Ensemble Yuni Leningradets qui n'a rien trouvé de mieux, dans le contexte tendu des relations entre la Russie et l'Ukraine, de présenter une magnifique danse, certes, mais ouest-ukrainienne ?

Finalement, Oleksi Bessmertni aura eu le mot de la fin, rappelant tout ce que la danse, en tant que langage universel, peut apporter aux enfants, que ce soit la soif de réussite, rythmée de discipline et de patience, ou encore le goût de l'effort, du surpassement et du rapprochement des peuples.

Léa Chalmont-Faedo,

En partenariat avec Berlin Poche

Photos : Yago Guerra (Brésil) ; Ho-jung Choi (Corée du Sud); Lara Fransen  Francesc Nel Lo (Belgique) crédit Stanislav Belyaevsky

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