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Prokofiev au sommet avec le Philharmonique de Radio France

En programmant le Concerto pour piano n°1 de Brahms et la Symphonie n°5 de Prokofiev, le Philharmonique de Radio France mettait du solide et consistant à son programme, emplissant copieusement la grande nef de la Philharmonie de Paris. Avec un succès fort mérité dans la symphonie, et une réussite plus limitée côté concerto.

A l'évidence le viennois connait son Brahms pour l'avoir fréquenté de longue date sinon même l'avoir dans ses gènes. Pourtant nous n'avons pu nous empêcher de ressentir une certaine frustration à l'écoute de ce concerto qui nous parut sous-joué, comme si ce soir, les doigts et les muscles ne pouvaient donner plus d'intensité. Il nous manquait à la fois du son, du corps, de la chair, et on n'y accusera pas la salle d'autant que nous y étions fort bien placés, et de l'intensité, de la tension, de la pulsation. Clairement une dimension faisait défaut à cette interprétation, assez sage de ton, qui usait volontiers d'un rubato qui restait de bon goût même si parfois se faisait-il trop insistant. Il y avait de fort jolis moments pianistiques mais ils nous évoquaient plus directement Chopin que Brahms. De son côté l'orchestre jouait parfaitement le jeu, n'écrasait pas « trop » le pianiste, lui offrait même de beaux moments de dialogue en particulier aux bois (magnifique hautbois solo).

Aucune frustration sonore avec la Symphonie n°5 de Prokofiev qui permit à l'orchestre de briller de mille feux et d'offrir au public une prestation de haute volée. Si on devait faire une seule critique ce serait, comme souvent et plus particulièrement dans le premier mouvement, un léger déficit de caractères donnés à chacun des épisodes, une façon de faire mieux ressentir les changements d'éclairage, de ton, de climat. C'était peut-être un peu trop homogène de ton ce soir, mais impeccablement réalisé quand même. Les deux mouvements médians furent les sommets de la soirée. Elan, rythmes, équilibres instrumentaux, intensité des phrasés, tout était en place pour captiver notre attention et réjouir nos oreilles dans un Allegro marcato puissant mais jamais lourd, et un Adagio à l'impeccable conduite du discours. Le final Allegro giocoso acheva d'emporter l'enthousiasme du public, manifestement renouvelé, de la Philharmonie, qui n'hésite pas à applaudir entre chaque mouvement. Reconnaissons que, même si « ça ne se fait pas », la prestation du Philharmonique de Radio France emmené par son future chef titulaire était en effet propice à ce genre de réaction bon enfant.

Crédit photographique : © Heikki Tuuli

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