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A Genève, Il Giardino Armonico tisse un XVIIe siècle pâlot

Dans le cadre des « Musiques en été », et une formation réduite de son orchestre plongent l'audience dans les querelles des « Anciens » et des « Modernes » du XVIIe siècle.

La chaude soirée d'été et la cour intérieure d'une des plus anciennes bâtisses de Genève s'avèrent un cocon merveilleux pour goûter une musique faite de finesse et d'improvisations subtiles. A ce jeu-là, excelle. Réduit à une douzaine de musiciens, dont certains pêchés dans l'ancienne garde de l'orchestre, l'ensemble offre un panorama de musiques s'étalant pendant une centaine d'années entre la seconde moitié du 16e siècle et la première moitié du siècle suivant.

Dans ce paysage musical parfois somnolent, admirablement musicologique, la qualité des musiciens (en particulier, on apprécie la complicité entre Stefano Barneschi, 1er violon et Marco Bianchi, 2e violon), montre en petites touches les différences évolutives des compositions. Des raffinements qui, il faut bien le reconnaître, ne se ressentent qu'à une écoute extrêmement attentive. Rien de spectaculaire, mais sous des aspects de musiques sans apparente profondeur humaine, on reste loin de l'émotion que celles du 18e siècle apporteront. On est dans la dentelle. Une musique certes élégante mais parfois manquant de sel.

, un incontesté maître en la matière, n'apparaît cependant pas comme un chef rassembleur de ses troupes. Jamais il ne les conduit au-delà du strict respect des convenances de cette musique. Le geste lent, le bras enveloppant, il n'électrise pas son monde. Alors ? Alors, parfois, même si on reconnaît la délicatesse du propos musical, on peine à s'enthousiasmer. On s'ennuie presque. Gentiment. Sans excès. Comme sa musique.

Même la présence forte de la mezzo-soprano ne parvient pas à bousculer cette retenue. Pourtant, dans les airs tirés de l'Orfeo de Monteverdi, elle ne manque pas de raconter le texte avec conviction. Puis, un splendide Amarilli mia bella de Caccini, dans lequel la mezzo distille des sons filés d'une extrême beauté, semble sonner le réveil de cette soirée.

En seconde partie du concert, la nuit douce et la bonne chaleur résiduelle de la journée donnent un nouvel élan lyrique à l'ensemble . Après une très belle Toccata per l'elevazione de Frescobaldi, la transformation du concert semble évidente. Comme si une autre musique avait envahi la place. Les musiques choisies, s'approchant de celles de J. S. Bach, sont plus accessibles au néophyte. Ainsi, on retiendra l'opulente sonate de .

Après un très beau et sensible l'Eraclito amoroso de , termine en beauté sa prestation avec un bouleversant « Lamento » d'Arianna de Monteverdi. Susurrant les premiers vers (« Lasciatemi morire ») avec toute la peine, toute la douleur de la perte de son amant, elle porte l'émotion à son paroxysme. On pourrait croire que le texte favorise le pathos mais, chez la mezzo soprano, c'est sa personnalité qui sublime le mot. Beau point d'orgue pour un concert qui est longtemps resté dans la sophistication plutôt que dans l'émotion.

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