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Nuit magique avec Turandot à Sanxay

C'est Turandot, l'ultime chef-d'œuvre de Puccini, qui a été choisi pour fêter les quinze ans d'existence des Soirées Lyriques de Sanxay, le petit festival qui s'invite dans la cour des grands. 

Il en a fallu de la passion à Christophe Blugeon, à ses équipes et aux nombreux bénévoles qui contribuent à la manifestation, pour faire d'un village poitevin de six cents âmes un rendez-vous incontournable de l'été lyrique hexagonal accueillant chaque année des chanteurs de dimension internationale. Il est vrai que le site gallo-romain, important lieu de cure thermale et de pèlerinage jusqu'au IVe siècle, constitue un écrin idéal pour ces représentations en plein-air.

La distribution vocale est de tout premier ordre. Annoncée souffrante, ne laisse pourtant entendre aucun signe de fatigue et impose une princesse moins monolithique que celles de nombre de ses consoeurs, et d'une rare crédibilité physique. La voix, puissante et égale sur l'ensemble de la tessiture, triomphe de tous les pièges de la partition et s'épanouit plaisamment dans l'aigu.  est une force de la nature, par le physique comme par la voix, et dévore le rôle de Calaf avec une facilité confondante, soulevant justement l'enthousiasme du public dans Nessun Dorma. Seul l'acteur est en retrait. Toujours aussi accomplie technicienne et fine musicienne, campe une Liu volontaire et affirmée, plus touchante toutefois dans son sacrifice qui touche au sublime que dans Signore, ascolta plus extérieur. , figure incontournable de la scène française, nous offre un Timur noble et émouvant tandis que les seconds rôles remplissent très honnêtement leur office à l'image d'un trio de ministres révélant les prometteurs Armen Karapetyan et .

La réussite musicale du spectacle doit aussi beaucoup à qui unifie remarquablement les forces du festival, qu'il s'agisse d'un orchestre très homogène ou de chœurs, adultes et enfants confondus, parfaitement à leur affaire. La partition est servie avec clarté et probité, les solistes bénéficient d'un soutien attentif et l'orchestre nous réserve quelques moments de grâce tel l'accompagnement des cordes pendant Non Piangere, Liu. Surtout, nous avons en permanence le sentiment d'un vrai travail de troupe, dans le meilleur sens du terme.

Le noir prédomine dans le travail d', qui évite le piège de la reconstitution pour nous proposer une vision de la Chine impériale personnelle et non dépourvue d'intelligence. Dans un dispositif constitué d'éléments mobiles, il s'attache à assurer la lisibilité de l'action et offre une mise en scène classique d'esprit agrémentée de quelques inspirations plutôt heureuses. Lorsque, au bout de la nuit, les cœurs s'envolent dans le ciel de Sanxay pour saluer le final (celui d'Alfano), nous oublions rapidement la fraîcheur de la nuit poitevine et prenons déjà rendez-vous pour 2016.

Crédit photographique : (Calaf)  © Patrick Lavaud

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