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Le Baroque Nomade en Éthiopie

Associé à des musiciens et danseurs éthiopiens, le se propose de faire revivre la rencontre entre musiques baroque et éthiopienne. Une expérience envoûtante.

Chrétien depuis le IVe siècle, l'Empire d'Éthiopie reçut aux XVIe et XVIIe siècles des jésuites portugais qui amenèrent avec eux des instruments de musique européens, et réussirent pendant quelques décennies à faire adopter une musique européenne à la cour et dans des églises abyssiniennes. et son ensemble retentent l'expérience de mêler instruments et voix baroques à ceux d'Éthiopie, à la fois dans des œuvres baroques et dans des œuvres traditionnelles éthiopiennes. Les premières sont au nombre de trois : un aria d'Orazio Michi, une tarantelle italienne et une improvisation sur le thème des Folies d'Espagne, rebaptisées Les Folies d'Abyssinie. À part leur titre (Wollo, Ambasale…), on ne saura pas grand'chose sur les secondes, le livret ne donnant aucune indication. De même, les danses éthiopiennes sont un aspect de la représentation qui nous échappe totalement (sauf par deux photos du livret).

« Même si nos référents musicaux sont très différents, nous n'avons pas peur de la musique de l'autre, et nous cherchons à lui faire une place dans la nôtre. »

Les musiciens tentent une rencontre des styles, chacun gardant fondamentalement sa manière d'utiliser son instrument ou sa voix. Ainsi, la grande liberté permise par les pièces profanes européennes consistant en des variations non écrites sur un thème, permet d'intégrer le masinqo (percussion), le kebero (monocorde à archet) et une flûte (non créditée) éthiopiens, ainsi que des voix. De même, dans les morceaux africains, lancés en général par les artistes éthiopiens, les instruments baroques apportent sonorités et traits européens, sans essayer de faire de la musique africaine. Quand elle fait retentir sa belle voix dans une pièce éthiopienne (Derbabba), le fait sur une simple voyelle. Mais c'est dans sa langue que intervient dans la tarentelle, sur le thème de départ. Hormis cela, l'effort d'intégration porte sur quelques imitations de motifs, mais surtout sur l'adoption de la gamme de l'autre : système pentatonique pour les musiques éthiopiennes, tonalité pour les occidentales. Le résultat de ce mélange : le caractère entraînant et envoûtant de ces morceaux qui fonctionnent presque toujours avec un système d'ostinato, en est amplifié. Les musiciens montrent à la fois beaucoup d'engagement et de justesse dans une musique en partie improvisée.

Une performance musicale de très bonne facture, pour un exemple brillant de dialogue des cultures.

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