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Emmanuel Krivine et Svetlin Roussev dans Brahms

Premier volet d'une série de concerts sur trois ans, et ont débuté leur résidence au Grand Théâtre de Provence par un programme Brahms. Il n'est pas jamais aisé de remplacer au pied levé le soliste initialement programmé (en l'occurrence Patricia Kopatchinskaja) mais cela n'a pas semblé poser la moindre difficulté au violoniste bulgare , parfaitement dans son élément.

Dès les premières mesures, le violoniste se fond dans l'univers brahmsien avec un naturel qui ne fait aucun doute sur ses affinités avec l'œuvre, usant de sa virtuosité à bon escient. Son vibrato dévoile une richesse de sonorités – quels aigus souverains ! La clarté de ses interventions permet une conduite limpide du propos ce qui oblige l'orchestre, dans son ensemble timide, à hisser son niveau de jeu. La direction de Krivine, au départ nerveuse, parvient ainsi à trouver un relâchement au fil des pages de l'Allegro ma non troppo dont la vision d'ensemble regarde résolument vers l'avenir. Les mises en tension alternent avec des plages lyriques teintées de douceur.

Peu inspirés, les bois manquent leur entrée au début de l'Adagio pris allant avec un phrasé uniforme et approximatif. Cette petite déception sera à nouveau vite gommée grâce au dialogue instauré par le violoniste qui déroule un tapis de nuances chatoyantes. On a connu des versions plus enlevées du Final. Celui-ci penche davantage vers un classicisme « viennois » côté cordes que vers des accents tziganes. Toutefois, l'engagement de part et d'autre rend l'ensemble vivifiant à l'image de la cadence, parfaitement maîtrisée du point de vue du ton et de la cohérence expressive. Dans une version dénuée de tout sentimentalisme, le Bach donné en bis par Roussev est touchant d'humilité.

En deuxième partie, conduit ses troupes dans la Troisième Symphonie de Brahms avec une attention constante. Toutefois, un manque de respiration interne rend difficilement lisibles les différents plans sonores des deux premiers mouvements et peine à caractériser chaque tableau harmonique. Un problème acoustique notable provient du côté des contrebasses qui résonnent de bout en bout de façon opaque. Dans les deux derniers mouvements, les violons libèrent plus d'intensité. Ainsi, le sublime thème laisse naître des couleurs empreintes de nostalgie et de retenue. De même, on trouve davantage d'unité dans un Final aux élans passionnés pour terminer la soirée sur une note positive à l'image du rappel. La rarissime Valse en la bémol de Dvořák est une page rafraichissante et raffinée qui nous permet d'entendre davantage de légèreté de la part de .

Crédit photographique : © Jean-François Leclercq

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