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A Lausanne, Maurice Béjart, tu danses encore !

Au même programme que Les Mamelles de Tirésias de Poulenc, l'Opéra de Lausanne fait appel au prestigieux Ballet Béjart qui, une fois de plus, enchante le public avec le ballet la Gaîté Parisienne sur une musique de .

En 1978, au Théâtre de la Monnaie de Bruxelles, le Ballet du XXe siècle créait cette « Gaîté Parisienne » qui se voulait la mémoire de pour ses années d'apprentissage à Paris. Mélangeant ses souvenirs personnels avec l'époque, Béjart raconte avec une poésie à nulle autre pareille les lieux, les personnes qui ont marqués sa vie parisienne. Trente-huit ans sont passés depuis le création bruxelloise et cette reprise sur la scène de l'Opéra de Lausanne n'a rien perdu de sa fraîcheur, de son humour et de son dynamisme.

Avec un début autobiographique (?) où raconte ses premiers pas dans l'étude de la danse. Sans musique, les (ses) six copains alignent quelques pas avant de s'arrêter devant un berceau. Déjà, dans ces tous premiers mouvements, on apprécie l'incroyable légèreté des danseurs, la complexité de leurs pas, l'incroyable centrage de leur personne. Bientôt, sortant du berceau, Bim, le surnom que portait .

Tout au long du spectacle Bim, alias s'émerveille de ce qu'il découvre. Cet émerveillement, le danseur en est habité. Il faut le voir danser avec une grâce inouïe, volant au-dessus de ses compagnons comme si lui seul avait reçu des ailes. Il est l'évidence faite danse. Comme à l'opéra, certaines voix occupent toute la scène même lorsqu'elles se taisent, campe l'espace même quand il regarde les autres danser. Alors qu'il s'élance, il sourit, il est dans le plaisir, dans la joie de danser. Ses pas, ses sauts sont alors là pour raconter, pour dire, pour chanter, pour sourire, pour rire. Quand on atteint un tel degré d'authenticité, plus n'est besoin de mots. On voit, on entend le geste. Certes, la chorégraphie de Béjart porte le danseur, comme la musique porte le chanteur, mais pourquoi y a-t-il des Pavarotti, des Domingo, des Bergonzi alors que les notes de Verdi ou de Puccini sont les mêmes pour tous les ténors ? Avec , on rejoint l'olympe des danseurs.

Si le danseur japonais fascine, les autres protagonistes de ce superbe ballet défendent magnifiquement la chorégraphie de Maurice Béjart. A commencer par le spectaculaire (Napoléon III), dont les sauts sont d'une pureté incroyable. On aime aussi l'élégance de Julien Favreau (Louis II de Bavière, L'Amant), l'énergie débordante de (Offenbach) et la fraîcheur de (La jeune fille en blanc).

Malgré l'imposante distribution de plus de quarante danseurs, l'enchaînement des scènes est rythmé. Comme le protagoniste principal, on est frappé par le plaisir à la danse qui transparait chez chaque protagoniste. Tant de danseurs, tant d'individualités réunies dans le seul but de donner corps au spectacle. Mission totalement réussie qui soulèvera les applaudissements nourris du public. Plus de huit ans après la disparition de Maurice Béjart, la troupe reste un creuset de talents d'exception et les chorégraphies du « maître » continuent d'être le gage d'une empreinte artistique intacte.

On soulignera le soin tout particulier donné aux costumes (dessinés par Thierry Bosquet et repris par Henri Davila) dont la facture est magnifique, riche et colorée.

L' a peine sorti de l'opéra de Poulenc se rue avec une belle énergie dans les pages endiablées d'Offenbach, revue des œuvres du compositeur que brode habilement . On note au passage des airs de La Belle Hélène, d'Orphée aux Enfers, de La Périchole pour terminer sur la célèbre barcarolle des Contes d'Hofmann avec l'intervention remarquée de la mezzo-soprano (Terpsichore/La chanteuse des rues). Comme pour Les Mamelles de Tirésias, le chef français dirige tout ce beau monde avec une belle précision, autrement plus demanderesse pour le ballet que pour l'opéra.

Crédits photographiques : © Gregory Batardon

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