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L’imposant Wagner d’Iván Fischer au Verbier Festival

Après un début de concert peu convaincant, le chef hongrois impose un majestueux et prenant Wagner dans un collage réussi de pages choisies du Götterdämmerung.

Les ouvertures d'opéra permettent souvent aux spectateurs de la soirée de s'installer dans leur siège, de s'y caler aussi confortablement que possible, de se préparer discrètement à l'entrée des solistes. Avec l'ouverture de Guglielmo Tell, Giacchino Rossini offre presque une dizaine de minutes à ces préparatifs. Giuseppe Verdi est, lui aussi, souvent généreux (sauf dans ces deux derniers opéras où il avait compris que l'essentiel n'était pas dans l'ouverture mais dans le texte). Pour sa part, se complait fortement dans des circonvolutions musicales où, comme un plaisir qu'il s'offrirait, tourne et retourne ses phrases dans des développements compliqués bâtissant ses ouvertures en véritables oeuvres symphoniques. L'ouverture des Meistersinger von Nürnberg en est l'exemple parfait.

Et, la conception qu'en a le chef hongrois apparait d'une complexité impénétrable. Les pupitres semblent se chercher. Non pas qu'on ressente des décalages, mais l'unité de la mélodie tarde à se faire entendre. Les thèmes se mélangent sans qu'on puisse réellement en dégager une ligne mélodique. Et peut-être qu'aussi des violons moins agressifs et des cuivres un peu plus présents auraient mieux souligné cette exigence.

Il n'en est pas de même avec la musique sacrée du Vendredi Saint de Parsifal. La direction d' se fait alors plus claire, plus harmonieuse. Tirant de son orchestre des couleurs intéressantes, on aurait aimé toutefois que conserve mieux la tension qu'il sait parfois créer. Comme s'il dominait mal l'orchestre, (avec quelques légers décalages) il semble se détacher du discours wagnérien même si par moments il réussit à faire passer de très belles images de lyrisme.

L'orchestre se révèle mieux tenu dans le Prélude et la mort d'Isolde délectant l'auditoire de pianissimo superbes. Semblant prendre enfin la mesure de cette sublime musique, le chef hongrois tisse un tapis d'harmonies pour la voix de la soprano . Malheureusement, la soprano semble en petite forme. L'attaque pianissimo de son air laisse apparaître quelques failles dans son chant, même s'il faut reconnaître l'extrême difficulté que représente pour une chanteuse d'attaquer à froid un air aussi demandeur. Si le registre grave et le médium sont bien contrôlés, les aigus sont un peu courts. Reste qu'ici, peine à émouvoir.

Cette première partie du concert laissant le spectateur un peu sur sa faim malgré de très belles interventions orchestrales, la seconde partie devait se révéler d'un meilleur niveau. Dans les extraits orchestraux du Götterdammerung, Iván Fischer apparait beaucoup plus inspiré. Souriant, apparemment plus décontracté, il offre une interprétation extrêmement fouillée de ces pages. Quoique moins spectaculaire que certains de ses collègues, il compose avec la puissance plus contenue du qui manque parfois de tragique, de force, d'autorité. Dans la scène finale de Brünnhilde, se dépense sans compter. Cependant, quand bien même la soprano suédoise est considérée comme l'une des meilleures Brünnhilde actuelles, dans cette soirée, elle est apparue vocalement légèrement empruntée. Si la puissance de la voix reste impressionnante, le registre médium clair, les aigus s'améliorant au fur et à mesure de sa prestation, les graves ne sont presque pas audibles. Cependant, après un très beau Ruhe, ruhe, du Gott !, Nina Stemme s'anime et semble trouver un nouvel influx pour terminer sa prestation dans une démonstration de ses capacités vocales jusqu'alors quelque peu retenues.

Crédit photographique : © Nicolas Brodard

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