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Le Philharmonique de Vienne retrouve tout son lustre avec Andris Nelsons

Si la dernière apparition de la prestigieuse phalange viennoise à Paris, en décembre 2016, sur la scène du Théâtre des Champs-Élysées avait pu paraître quelque peu décevante sous la direction de Daniel Barenboim, force est de reconnaître que les Wiener Philharmoniker présentaient ce soir un tout autre visage avec une petite harmonie concentrant leurs plus éminents solistes (, et la française ).

Cela n'avait pas été forcément le cas lors de leur précédent concert. Une irrégularité de prestation maintes fois constatée, probablement en rapport avec l'importante charge de travail des musiciens qui doivent assurer conjointement le programme lyrique de l'opéra de Vienne, majorée par l'absence, délibérément assumée, de directeur musical permanent. La direction étant confiée pour cette série de concerts au fougueux chef letton, augurant d'une toute autre lecture comme la suite le prouvera. En soliste, le violoncelliste solo de l'orchestre, , membre du Wiener Kammerensemble.

Dès l'Allegro initial du Concerto pour violoncelle de Dvořák, le ton est donné par la direction très dynamique d', le phrasé de l'orchestre est souple et tendu, engagé, parfois abrupt donnant beaucoup de relief et de couleurs au dialogue qui s'établit rapidement avec le violoncelle malgré une entame un peu pâteuse de . Le chant plaintif du violoncelle où se mêlent accents slaves et nostalgie de l'exil se trouve renforcé par le saisissant contraste, volontairement entretenu, avec le souffle épique de l'orchestre évoquant les grands espaces caractéristiques de la période américaine du compositeur, nous rappelant, par instant, la Symphonie n° 9 dite « Du Nouveau Monde » composée quelques années auparavant. Les vents (clarinette, flûte, hautbois, basson) sont, ce soir, particulièrement éloquents tandis que le cor, sans décevoir, garde cette sonorité particulière un peu nasillarde typiquement viennoise qui n'est pas du plus bel effet, les cordes gardant, quant à elles, leur fabuleuse sonorité. développe, dès lors, un jeu sobre, peut-être un peu retenu, mais la sonorité superbe de son violoncelle pousse l'émotion et la ferveur à son comble dans l'Adagio central, soutenu par une clarinette d'une sublime rondeur. Le mouvement final est l'occasion de juger de la limpidité de la ligne et de la rigueur de la mise en place où la virtuosité du violoncelle le dispute à la dynamique orchestrale dirigée de main de maître par le chef letton. La Sarabande de la Suite n° 3 de Bach vient conclure en beauté cette première partie.

Après la pause, la Symphonie n° 6 dite « Pastorale » de Beethoven confirme la bonne forme de la phalange viennoise. y fait respirer la joie, la paix et la sérénité, préférant une lecture plutôt impressionniste que franchement narrative, s'inclinant ainsi devant les souhaits du compositeur, ardent défenseur de la musique pure. Seul l'Orage, très narratif, déroge à la règle, nous permettant d'apprécier le vrombissement effrayant des contrebasses et cordes graves, les éclairs de la petite flûte et de la clarinette scandés par les timbales. Une lecture globalement satisfaisante de cette œuvre célèbre, juste dans le ton comme dans la note, permettant aux Wiener Philharmoniker de retrouver, face au public parisien, toute leur superbe légendaire. Cerise sur le gâteau, l'orchestre et son chef offrent en « bis » au public enthousiaste l'Ouverture des Créatures de Prométhée, menée de façon là encore très engagée. Une belle façon de conclure cette agréable soirée qui, sans rester dans les mémoires, eut au moins le mérite de nous rassurer.

Crédit photographique : Andris Nelsons © Marco Borgreeve

 

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