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Quatre mains et un violoncelle enivrant à La Foce

Le concert inaugural des Rencontres musicales en Terre de Sienne lance une nouvelle ère pour ce festival, sous la direction artistique du pianiste .

Le soleil a disparu derrière les collines. La lumière s'estompe, les murmures cessent dans la longue cour de Castellucio, une imposante ferme fortifiée au cœur du Val d'Orcia en Toscane. et entrent et s'installent au piano, lui bel homme, très brun aux yeux bleus, elle, minuscule et diaphane. Dès les premiers accords, le dialogue s'engage entre les deux pianistes qui, à l'évidence, jouent dans une complicité qui les rend presque indiscernables dans une même élégance. Le concert inaugural des Rencontres en Terre de Sienne commence par la Sonate à quatre mains en do majeur de Mozart. Sérénité, légèreté, jeux d'échos et alternances, les aigus lisses et ronds de Bax répondent aux graves harmonieux de Chung et leurs mains se croisent sur le clavier dans une intimité d'autant plus naturelle qu'elle est aussi conjugale.

Arrivant d'une tournée de onze villes d'Asie avec le chef Daishin Kashimoto du 5 au 19 juillet, puis un récital au Wigmore Hall le 22 juillet, dirige désormais les Rencontre en terre de Sienne qui se tiennent en Toscane, cette année du 29 juillet au 6 août. Nommé pour trois ans, le nouveau directeur artistique du festival nous dit qu'il a réuni une « équipe de rêve » avec ses artistes préférés et amis proches qui aiment travailler ensemble. « Et j'ai essayé de penser à des programmes qui soient agréablement équilibrés, appétissants, comme pour un bon dîner. »

Viennent ensuite deux tangos d'Astor Piazzola, Milonga del Angel, et le Grand Tango, avec au violoncelle le créateur et ancien directeur artistique du festival, , majestueux et émouvant. Il faut un moment à Bax pour se mettre au niveau d'émotion du violoncelliste dont les sons étirés colorent le tango d'une dignité triste, déchirante, sans pathos pourtant. Ses gestes vifs de danseur écrivent la déchirure des rythmes dans des sonorités qui rappellent parfois celles du bandonéon. Bax ne se libère qu'à la fin, les deux instruments enlacés dans une danse endiablée.

Un concert délicieusement épicé

La deuxième partie du concert commence par l'éclat des Variations de Witold Lutosławski sur un thème de Paganini, Chung gracieusement lancée dans un bastringue de génie, debout même par instant, Bax plus classique mais restant à la hauteur de l'énergie et de l'humour de la pianiste.

La Suite pour deux pianos de termine le concert. Une interprétation très romantique, avec des légèretés et des rebondissements, les mouvements symétriques des pianistes donnant l'impression qu'ils dansent réellement une valse, dans le second mouvement de la sonate. Le troisième mouvement, Romance, fait penser à la merveilleuse Vocalise. Le dialogue du duo est intense dans la troisième partie, dense et presque violent. On se prend tout de même à rêver à ce qu'a pu être l'interprétation improvisée de cette sonate, par Rachmaninov lui-même avec Horowitz, un soir qu'ils étaient ensemble à une soirée, à Los Angeles, en 1940…

Crédit photographique : © Paul Flanagan

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