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Premier disque sur l’orgue de Radio France par Thomas Ospital

Nouvellement construit, l'orgue de l'auditorium de Radio France se fait entendre pour la première fois au disque sous les doigts et les pieds experts de dans un programme Bach-Escaich, agrémenté de courtes Visions improvisées.

Lors du chantier du nouvel auditorium en 2014, on avait déjà pu approcher l'orgue en construction grâce à Jean-Michel Mainguy, coordinateur du projet. La visite de ces lieux en gestation laissaient imaginer une réalisation de grande classe. Le choix même du facteur d'orgue Gerhard Grenzing, mondialement connu, de culture allemande et ouvert à l'orgue baroque du sud présageait d'un orgue typé et judicieusement harmonisé. Le nouvel instrument s'inspire de la facture des grands maîtres du passé, tout en s'ouvrant à la technologie moderne, permettant à l'interprète de nouvelles possibilités, inédites, pour la composition ou l'improvisation. L'orgue est également pensé pour s'intégrer et dialoguer avec les diverses formations orchestrales d'une salle de concert moderne.

Dès les premières notes du Prélude et fugue en la mineur de qui ouvrent le disque, on entend un plein-jeu raffiné évoquant quelque instrument historique fréquenté par son auteur, installé depuis bien longtemps en Catalogne. L'harmonie est équilibrée et les sonorités s'intègrent agréablement dans l'univers boisé de l'auditorium. L'acoustique, au demeurant assez courte, ne gêne en rien le déploiement de la pâte sonore. Bach se sent chez lui, sans détour. Du même compositeur viendront ensuite une Sonate en trio, un Choral orné et le joyeux Prélude et fugue en sol majeur.

Afin de montrer les possibilités offertes par l'instrument avec un répertoire de notre temps, a choisi les 6 Études-Chorals de . Ces pièces puisent leur inspiration dans des mélodies de chorals luthériens que l'auteur utilise au travers de son langage habituel, reconnaissable entre tous. On retrouve ses rythmes incantatoires, puissants, joyeux, et ses atmosphères extatiques. On ne sait par quel mystère la musique de touche de manière aussi vive l'auditeur…

Afin de relier Bach et Escaich, deux extrêmes parfois rapprochés, offre cinq courtes improvisations intitulées Visions. Ce sont des interludes qui prennent une grande valeur au regard des œuvres qu'ils entourent par des climats sonores originaux et complémentaires par rapport au reste du programme. On y retrouve le thème des quatre lettres de Bach, et quelques hommages rendus à qui fut le professeur d'Ospital. Ces Visions sont aussi le prétexte pour utiliser le « vent variable », le « sostenuto » ou une boîte expressive très sophistiquée qui sont autant d'accessoires de l'orgue du XXIe siècle, permettant de le rapprocher encore plus de l'orchestre par des nuances d'une grande subtilité.

Organiste titulaire du grand orgue de Saint-Eustache à Paris et premier organiste en résidence au nouvel auditorium de Radio France, Thomas Ospital nous offre un récital de grande qualité. Son jeu est posé, expressif et maîtrisé. Sa place aux côtés de ce nouvel instrument l'amène à le faire rayonner « in situ » avec divers orchestres. Il était temps que la France dispose enfin de salles de concerts dotées d'orgues d'importance. Lyon avec l'auditorium Maurice Ravel, Paris avec la Philharmonie et Radio France apportent désormais un trio utile et indispensable pour les temps à venir.

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