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Cendo croise les univers dans Le jour juste avant l’océan

C'est dans l'acoustique généreuse de l'église Sainte-Marie-Madeleine à Gennevilliers, ville où l' est en résidence, que dirige en création mondiale Le jour juste avant l'océan de , un Objet Musical Non Identifié (OMNI), selon les termes du compositeur, qui met au centre du projet des textes du Barullo, « livre dodécaphonique » tout en saillies du dramaturge et scénographe hispano-argentin Rodrigo García.

L'idée de départ est de confronter l'univers de la musique écrite et celui de l'improvisation. Sous la voûte très résonnante de l'église Sainte-Marie-Madeleine, cinq musiciens de l' (clarinette, trompette, tuba, guitare électrique et batterie) jouent aux côtés de cinq musiciens de Multilatérale (flûte, clarinette, piano, harpe et contrebasse). Au premier plan, face au chef, les six chanteurs des Métaboles donnent une « lecture sonore » du texte de Rodrigo García traduit en français. Scandés, étirés, hachés, les mots de l'écrivain sont davantage parlés voire théâtralisés que chantés. Les soli qui jalonnent la trajectoire et en modèlent la dramaturgie (les chanteurs se lèvent à tour de rôle), relèvent d'une écriture plus virtuose. Les instruments, dont le matériau semble dériver de l'aspect phonétique du texte, tirent des voix leur énergie et leurs propres actions sonores. Les deux sources tendent d'ailleurs à se confondre parfois. À l'instar du « suivi de partition » (logiciel développé à l' dans le domaine de l'électronique), Cendo demande aux jazzmen de réagir « en temps réel » aux propositions de l', intégrant ainsi, dans un espace instrumental fixé, la liberté et l'énergie du geste improvisé. La fusion qui en résulte engendre une toile sonore flamboyante, d'une intensité visant l'excès, à la faveur d'une réverbération qui comble notre compositeur de la saturation. Au mitan de l'œuvre, Cendo laisse aux experts une session d'improvisation quasi volcanique. Le solo galvanisant de guitare électrique, dans la quatrième section, El Bulli, semble quant à lui croiser l'écriture et l'improvisation.

La tâche de est aussi délicate que bien assumée, au sein d'un univers oscillant entre contrainte et liberté, équilibre des forces et excès de son. Les chanteurs donnent une vitalité galvanisante à l'ensemble et l'énergie passe d'un ensemble instrumental à l'autre. Le titre de cet OMNI reprend celui de Brenard-Marie Koltès, La nuit juste avant la forêt, dont modifie les termes, préférant quant à lui filer la métaphore de la vague et de la submersion.

Crédit photographique : © Florence Riou

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