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Järvi : première intégrale des symphonies de Sibelius avec orchestre français

Grâce à , l' a enregistré en concert public l'intégrale symphonique de . Un coffret de trois CDs publié par RCA rend compte de cette collaboration inédite. Comment se positionne-t-elle face à la concurrence internationale ?

Le chef estonien connaît intimement l'œuvre de Sibelius ; son pouvoir de persuasion et son enthousiasme ont eu raison des réticences françaises bien connues envers ce répertoire longtemps ignoré, voire dénigré. De plus, la compétition récente sur ce segment précis est rude. Il faut compter, rien que pour la dernière décennie, sur les réussites, aussi incontestables qu'embrasées, de John Storgärds (Orchestre symphonique de la BBC, Chandos), Simon Rattle (Orchestre philharmonique de Berlin, BP Records), Okko Kamu (Orchestre symphonique de Lahti, BIS) et enfin Osmo Vänskä (Orchestre du Minnesota, BIS, gravé en 2012-2016), sa seconde intégrale, moins convaincante toutefois que son travail avec l'Orchestre symphonique de Lahti enregistré, pour BIS également, en1996-1997.

Face à l', entre 2012 et 2016, Järvi, on le perçoit, a dû fournir énergie et détermination pour conduire l'orchestre parisien à une compréhension et une adhésion suffisantes pour justifier la concrétisation de la première intégrale assurée par un orchestre français. Les traits caractéristiques du chef se retrouvent avec ses tempos plutôt rapides, des articulations nerveuses et vives, des mouvements lents apaisés mais jamais languides. Son aisance dans les passages les plus dynamiques emporte l'adhésion, par exemple dans le Finale (4e mouvement) de la Symphonie n° 2. De plus, le cycle bénéficie d'une lecture analytique très instructive laissant entendre des instruments ou des sections le plus souvent étouffés par la masse orchestrale. De cette collaboration synergique, l'esprit de Sibelius souffle, tour à tour épique et intimiste, même si la perception d'un certain manque d'automatisme et de coulant idiosyncrasique est perceptible ici ou là.

Ainsi l'énigmatique Symphonie n° 4 figure au sommet du corpus avec sa profonde beauté et son langage unique impressionnant. L'éclat lumineux et les élans orchestraux irrésistibles caractérisent l'Allegro final de la Symphonie n° 2 tandis que la suivante, engagée et entraînante, dévoile des traits rarement entendus dans les autres gravures. La plus célèbre du cycle, portant le numéro 5, inspire autant le chef que les pupitres de l' au meilleur de leur forme. Leur exécution du fameux ultime mouvement mérite l'écoute. La clarté et la douceur, discrètement minées par une sourde menace, de la Symphonie n° 6 se trouvent parfaitement rendues par les protagonistes. Le septième et dernier volet de ce corpus, véhicule de tant de nouveautés et de profondeur, inspire l'orchestre et son chef et figure en bonne place dans la compétition internationale.

La qualité technique des enregistrements aurait mérité davantage de soins, ainsi les fortissimos de l'Allegro molto du premier mouvement de la Symphonie n° 2 pâtissent d'une saturation sonore incompatible avec l'exigence attendue. Les autres symphonies passent beaucoup mieux et le résultat paraît globalement de meilleure qualité, permettant l'intérêt et la bienveillance de l'écoute. Au total, un travail louable et très bien ficelé, convaincant souvent, mais insuffisant pour inverser la discographie à son plus haut échelon.

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