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Une Messe en si mineur subtile et profonde par l’ensemble Pygmalion à la Philharmonie

Grâce au chœur de l', particulièrement remarquable, et à son orchestre raffiné, donne une interprétation vivante et très humaine de la Messe en si mineur, testament musical de Bach impressionnant par sa complexité.

La Messe en si mineur de est une œuvre exigeante, par son ampleur comme par la richesse de sa composition. Dans les deux dernières années de sa vie, Bach y a retravaillé des pièces composées à différentes périodes au cours des décennies précédentes, pour en faire une œuvre nouvelle et complexe, d'une grande subtilité, en apportant une forme de synthèse de ses différents styles. Cette messe revêt aussi une dimension paradoxale pour le luthérien qu'était Bach, qui en fait une grande œuvre de foi, au-delà du rituel.

l'aborde avec humilité et raffinement, tout en donnant une place essentielle au chœur, ce dont témoigne visuellement, dans la disposition du plateau de la Philharmonie, la place des solistes, qui viennent sur le devant de la scène pour leurs interventions en solo ou en duo, mais s'éloignent sur le côté quand ils ne chantent pas, à l'écart de l'aura de l'orchestre et du chœur. On est frappé dès le Kyrie initial par la recherche d'un équilibre des timbres, tout en douceur, qui permet d'entendre en détail et en finesse le théorbe ou le son des traversos, même dans les tutti. Cette relative modestie du niveau sonore se révèle précieuse pour apprécier les contrastes ménagés par Bach entre des moments parfois très intimistes, où seule une partie des instruments chargés du continuo soutiennent un des chanteurs et d'autres plus majestueux où les trompettes et timbales entrent en jeu.

Le chœur apporte une profondeur exceptionnelle à cette interprétation, donnant le sentiment d'entendre chacun de ceux qui le compose, mais sans perdre pour autant son unité et son homogénéité. Ses pianos sont d'une grande beauté et les quelques passages a capella particulièrement émouvants. Il excelle dans les mouvements fugués. Il incarne, dans une relation très intime avec l'orchestre, l'architecture caractéristique des plus grandes œuvres de Bach, du détail contrapunctique à l'articulation d'ensemble des différentes parties. Mais ici l'impact émotionnel s'épanouit au-delà de la construction intellectuelle qui impressionne chez Bach.

Chacun des pupitres de l'orchestre trouve l'occasion d'être mis en valeur, notamment lorsque les chanteurs solistes interviennent. Violon solo très orné pour le Laudamus te chanté par Léa Desandre avec beaucoup de finesse ; ritournelles à la flûte solo lors du duo entre la soprano, , et le ténor, Emiliano Gonzalez-Toro, dont les voix s'harmonisent délicatement ; étroit dialogue, ponctué par les cordes, du hautbois d'amour et de l'alto de , dont le timbre original touche ; voix fluide de pour le solo de basse qui se superpose au trio des deux bassons et du cor, impressionnant de douceur virtuose –basse qu'on retrouve plus tard en duo avec deux hautbois. Emiliano Gonzalez-Toro est bouleversant, avec une grande simplicité et un timbre très uni, dans le Benedictus, accompagné seulement par les tendres mélismes du traverso solo, particulièrement délicat, et le jeu si raffiné de la viole et du théorbe de . Un doux balancement des cordes soutient la grande expressivité de dans l'Agnus Dei. Mais c'est le chœur et l'orchestre qui concluent avec une ardente ferveur.

Crédit photographique : © Igors Studio

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