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Anne Sofie von Otter dans l’intimité des salons

Une soirée poétique avec l'aide précieuse de .

Mieux vaut ne pas venir à ce concert avec de fausses attentes : la voix d' n'est plus celle de ses débuts, et ce qu'elle offre aujourd'hui au public n'est plus la plénitude sonore de ses plus belles années. Ce qui n'a pas changé, en revanche, c'est l'intelligence et la sûreté de goût de l'interprète. Le programme qu'elle propose ce soir prouve une fois de plus ces qualités, dans le cadre idéal du Théâtre Cuvilliés. La première bonne idée de la soirée est le choix de pour l'accompagner. Le pianoforte n'a pas les faveurs des orthodoxes du Steinway, mais un tel programme en justifie mieux que tout l'emploi. Schubert est le fil rouge du récital, mais c'est par Mozart qu'il commence, pure musique de salon – non pas dans le sens d'une mondanité, mais d'une soirée intime où la frontière entre musiciens et public s'efface. La voix de la chanteuse devient souvent blanche, et une tension apparaît dans les notes les plus difficiles, mais c'est cela aussi le salon : non pas les premiers virtuoses du moment, mais des êtres chers qui chantent pour vous. est un être cher pour tant de mélomanes.

Chez Mozart comme chez Schubert, la chanteuse est à mille lieues des grands élans opératiques, même là où ils seraient envisageables ; dans l'admirable Abendempfindung de Mozart (qu'elle chantait voici peu sur la grande scène de l'Opéra) comme dans la sombre forêt de la Waldesnacht schubertienne, elle livre une leçon de diction et de musicalité qui fait naître une puissante émotion – et peu importe ici les limites de la voix.

Musique de salon aussi les mélodies d'une sage séduction du romantique suédois , que la chanteuse présente en contraste avec celles, plus fantasques, de son compatriote Berwald, le tout permettant de parcourir un ensemble de thèmes et d'atmosphères qui décrivent bien la palette des divertissements domestiques, jusqu'à la sage licence des « doux climats » chantés par Berwald, en français dans le texte.

Mais , ici, n'est pas seulement accompagnateur : les quelques pièces connues et moins connues qui servent d'interlude dans chacune des deux parties du concert sont de grands moments de délicatesse et de poésie sonore, qui montrent admirablement l'intérêt de son instrument. Le pianoforte n'a pas l'ampleur symphonique du piano moderne, certes, mais il compense par la clarté d'articulation, par l'intimité du ton, par la légèreté du chant, comme le montre Bezuidenhout. Son écoute pour sa partenaire est aussi remarquable que sa profonde compréhension du répertoire idéal de son instrument.

Crédits photographiques © Wilfried Hösl

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