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Le génie pur de Pollini dans les dernières sonates de Beethoven

D'une incroyable énergie, offre à la Philharmonie de Paris un récital exceptionnel avec les trois dernières sonates de Beethoven.


Son enregistrement des dernières sonates pour piano de pour Deutsche Grammophon reste après quarante ans l'un des piliers de la discographie. Pourtant, tout particulièrement à quelques semaines des derniers concerts de l'intégrale de Daniel Barenboim, il était à craindre également pour un programme aussi complexe de ne retrouver de qu'un intéressant souvenir du passé, plutôt qu'une interprétation passionnante pour le présent.

La surprise est donc de taille lorsque le pianiste, aujourd'hui âgé de 77 ans, d'un pas extrêmement rapide, avec pour seul but le Steinway & Sons portant le nom du facteur Fabbrini, au milieu de la Philharmonie de Paris. À peine assis, il entre vigoureusement dans le court Vivace, ma non troppo de la Sonate n° 30 en mi majeur op. 109 pris d'un tempo extrêmement rapide, au risque d'effleurer les touches à côté de celles jouées. Toute la soirée, de nombreuses croches apparaissent brouillées, sans que cela n'impacte la grandeur de l'interprétation. Immédiatement enchaîné, le Prestissimo est introduit par un accord brutal sur le clavier, poursuivi par des parties sans aucune concession, d'une incroyable justesse pour faire ressortir la violence et la modernité des derniers chefs-d'œuvre pianistiques du maître de Bonn. L'Andante maintient la même ligne, droite autant que rapide, en comparaison avec celles de la majorité des autres pianistes. Dans les variations de la deuxième partie de ce finale, Pollini ne recherche pas à montrer l'influence de Bach sur Beethoven, pour entretenir au contraire un cantabile énergique, prémisse à celui, encore plus génial, donné après un simple aller-retour en coulisse au pas de course sous les applaudissements.

On entre alors dans l'opus 110, avec un incroyable développement sublimé par les trilles de la main droite. De l'urgence – martelée aux derniers accords – de l'Allegro molto, traité en à peine une minute trente, naît le contraste du Finale et de sa plainte d'une rare puissance. Le développement de la fugue fascine plus par sa modernité qu'il ne rend hommage aux formes du passé avec lesquelles Beethoven a toujours énormément composé.

L'entracte n'est pas de trop pour laisser le temps de reprendre ses esprits. Puis, la Sonate n° 32 en ut mineur op. 111 débute par un Maestoso assombri par la pédale et le doigté relativement dur du pianiste, avant un déluge d'arpèges, vite coupé dans son élan, pour être relancé encore plus rapidement. Le traitement des variations du second mouvement achève avec une intelligence rare ce concert, auquel s'ajoutent deux bis. Du Beethoven tardif des dernières Bagatelles opus 126, on cherche alors pour celle Presto un seul exemple dans la discographie d'une interprétation d'une telle célérité. Il ne manquait ce soir que les micros.

Crédit Photographique : © Fred Toulet

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