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Programme Solitude avec James Gilchrist et Anna Tilbrook

Quatre œuvres pour voix et piano, parfaitement complémentaires et contrastées, traitent d'une thématique commune, la solitude. et Ann Tilbrook proposent une interprétation qui allie raffinement et simplicité.

Les amoureux du lied et de la mélodie ne manqueront sous aucun prétexte cette superbe sélection musicale réalisée autour du thème de la solitude. La problématique engendrée par ce sentiment pour le moins contradictoire, tantôt choisi et recherché et tantôt imposé par des circonstances malheureuses, est abordée de front par la célèbre pièce de Purcell, donnée ici dans l'arrangement pianistique de Britten. Le tiraillement exprimé par le texte entre le besoin de compagnie et l'appel vers la méditation y est résolu par l'évocation de l'art musical, né et cultivé dans la contemplation poétique, mais mis en œuvre dans le but de satisfaire les goûts et les besoins de différents publics.

La dichotomie entre l'appel de la gloire et le besoin de plénitude de l'âme, entre la vie publique et une vie de retraite ou, en deux mots, le contraste entre les aspirations de l'« Allegro » et celles du « Penseroso », est tout le sujet d' Einsamkeit du jeune Schubert, un cycle injustement méconnu, composé par un musicien encore sous l'emprise de An die ferne Geliebte de Beethoven.

Enregistré en première mondiale, le cycle Under Alter'd Skies du compositeur britannique traite de la thématique de la solitude en reprenant certains des plus beaux poèmes du cycle In Memoriam de Lord Alfred Tennyson, notamment ceux dans lesquels le poète déplore la séparation découlant de la perte tragique de son jeune ami Arthur Hallam, emporté brutalement dans son jeune âge. Le romantisme exacerbé du texte trouve un écho dans la facture étonnamment lyrique et mélodique d'une production musicale contemporaine, qui sait flatter autant les contours et les ondulations de la voix que les sonorités ou les méandres sémantiques du texte poétique.

Plus connues maintenant, les délectables Hermit Songs de évoquent les joies, les plaisirs et les frustrations de la vie monastique, célébrée pour la satisfaction des besoins spirituels de l'âme tout comme elle est raillée, parfois sur le ton de la facétie, pour les erreurs et errances vers lesquelles peut mener une vocation mal vécue et mal assumée. La solitude, et tous les subterfuges que l'on peut imaginer pour y échapper, est un sentiment décidément bien humain.

Doté de ce timbre caractéristique de ténor anglais, voix relativement peu puissante mais richement timbrée dans le grave et souple dans les hauteurs, détaille le texte avec finesse et raffinement. Idéal pour exprimer les affres de la mélancolie, cet habitué des Passions de Bach sait également trouver les mille nuances qui permettent de suggérer les diverses aspirations de l'âme. Peut-être est ce dans les Hermit Songs, cycle généralement et sans doute à tort associé à la voix de femme – peut-être en raison de fait qu'il fut créé par –, qu'il parvient à faire passer le plus d'émotions. Le clin d'œil y fait bon ménage avec la sincérité de la dévotion, l'appétit de (bien) vivre et la célébration des petites joies du quotidien. propose au piano un accompagnement exemplaire, à la fois attentive aux intentions et aux respirations du chanteur, et suffisamment autonome musicalement pour trouver elle aussi, pour les quatre pièces inscrites au programme, les subtiles couleurs d'une écriture pianistique de la plus grande qualité.

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