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Paavo Järvi et l’Orchestre de Paris, des retrouvailles imprévues

Au jeu de la chaise musicale, pour raison sanitaire remplace au pied levé Tugan Sokhiev à la tête de l', dans un nouveau programme, superbe mais totalement chamboulé, et sans grande originalité, associant l'incontournable Concerto pour violon de Tchaïkovski (en lieu et place du trop rare Concerto n° 3 de Saint-Saëns) avec en soliste et deux chefs d'œuvre de musique française, La Mer de Debussy et Daphnis et Chloé de Ravel remplaçant le Sacre du printemps de Stravinski !

On ne s'attardera pas sur la genèse douloureuse du Concerto pour violon de Tchaïkovski, composé en 1878 sur fond de déboires amoureux en rapport avec un mariage raté, compliqué d'amours homosexuelles avec le violoniste Losif Kotek. Premier concerto russe à s'être imposé dans le répertoire violonistique, , à son habitude en fait ressortir toute la sève faite d'un détonnant mélange de virtuosité époustouflante et de lyrisme exacerbé réunis dans une pyrotechnie, à la fois brillante et inspirée où le violon semble faire cavalier seul au point de donner l'impression de diriger l'orchestre. Malgré les difficultés techniques, l'Allegro initial est négocié avec un naturel et une aisance confondants, avant que le dialogue ne s'instaure avec la petite harmonie (flûte et clarinette) dans une Canzonetta très poétique. L'Allegro vivacissimo final, très nuancé, clôt cette interprétation sur des rythmes tziganes jubilatoires, particulièrement mis en valeur par de judicieux ralentissements rythmiques.

Après une courte pause, la deuxième partie de concert est consacrée à la musique française avec La Mer de Debussy et la Suite n° 2 de Daphnis et Chloé de Ravel, deux œuvres régulièrement mises au programme de l', déjà interprétées par le chef lors de son mandat de directeur musical. Les impressions sont, ici, plus mitigées : dans La Mer, les performances solistiques sont bien présentes, mais on ressent en permanence une sensation d'inabouti devant les rythmes debussystes complexes que le chef peine à fédérer dans un discours cohérent. En revanche, Daphnis et Chloé, au tissu orchestral plus dense, retrouve de belles couleurs ravéliennes sur une dynamique soutenue, dans un phrasé plus descriptif et plus tendu sollicitant tous les pupitres d'un irréprochable de bout en bout.

Crédit photographique : © Zdenek Chrapek

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