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Les talents du Tatarstan célèbrent Tchaïkovski

Ce coffret en édition limitée et en collaboration avec la chaîne Mezzo célèbre le 180e anniversaire de la naissance du compositeur. Un bon prétexte pour découvrir une belle anthologie gravée par le peu connu et valeureux orchestre du Tatarstan et son chef .

Il est utile de rappeler que l' a été fondé en 1966 et qu' en est le directeur depuis une décennie. La formation a été remarquée par divers enregistrements pour Melodiya, qu'il s'agisse de symphonies de Mahler ou de l'intégrale (excellente) des concertos de Chostakovitch.

Débutons tout d'abord par le legs symphonique. Le son de l'orchestre évoque, par bien des aspects, celui des phalanges de l'ex-URSS. On garde en mémoire les couleurs de l'Orchestre Symphonique d'URSS sous la baguette de Svetlanov, notamment, dans les premières symphonies. C'est assurément l'esprit du théâtre, de l'opéra et du ballet qui s'imposent dans cette version (oublions, ici, le souvenir du Philharmonique de Léningrad) : contrastes sanguins et vécus dans l'instant, expressions tendues sur tous les pupitres, vibrato généreux, rythmes brusqués et prises de risques assumées. C'est parfois un peu brouillon comme dans les finales des symphonies n° 4 et n° 5. En effet, la dimension emphatique emporte tout sur son passage et provoque quelques dérapages dans les vents. Les bois ne sont pas exempts de duretés et de couleurs parfois aigres dans les forte. Pour autant, ces lectures bien captées expriment un engagement total et soulignent des personnalités fortes notamment dans les cors, trompettes, clarinettes et hautbois. Ces pupitres se dévoilent dans les trois premières symphonies. Le chef s'appuie sur des pupitres de cordes impeccables. La progression dramatique demeure à chaque fois cohérente, sans baisse de tension. La Symphonie « Pathétique » est exemplaire même si les équilibres manquent de précision, notamment dans la Valse. Manfred est interprété « au premier degré », comme figé par des effets de masse assez poussifs. Il est dommage que l'élan du deuxième mouvement disparaisse alors que la pastorale est plutôt réussie. Cette partition demeure décidément mal-aimée et on revient sans cesse aux lectures de Markevitch, Silvestri, Svetlanov et, plus récemment d'Andris Nelsons.

enregistra le Concerto pour piano n° 1 à l'âge de 18 ans. Un sérieux abattage et une interprétation élégante. L'orchestre l'accompagne avec finesse dans son choix de tempi très rapides, voire excessifs. C'est une lecture « lumineuse » au premier sens du terme, parfois un peu superficielle tant le jeu survole les lignes mélodiques. Par contraste, l'Andantino Semplice s'alanguit alors que le piano n'entre pas dans la matière sonore. Le Concerto n° 2 est pris « à l'arraché » : s'immerge avec robustesse dans le flot musical qui emporte tout sur son passage. La virtuosité débridée du soliste est canalisée avec beaucoup d'intelligence musicale par l'orchestre et divers solistes : flûte, clarinette et cor puis, dans le second mouvement, violon et violoncelle solos. Ils méritent tous des éloges car grâce à ces derniers, l'œuvre devient tantôt un triple concerto, tantôt une musique de chambre. Enfin, on ne résiste pas au thème si novateur qui se déploie dans le Concerto pour piano n° 3. Inachevée, la partition fut complété par Taneiev. Maxim Mogilevsky possède une belle technique mais le jeu est d'une dureté assez rédhibitoire.

Bien peu jouée, la Fantaisie en sol majeur met en scène le pianiste . De cette page en deux mouvements datée de 1884 et qui fut inspirée par la Suite n° 3, le pianiste tire le meilleur alors qu'elle est loin de posséder l'inspiration des deux premiers concertos. On remarque le beau dialogue avec le violoncelle au début du second mouvement. Le violoncelle, précisément, éclaire les Variations Rococo interprétées avec beaucoup de fougue et de précision par Boris Andrianov. Elles referment un coffret inégal, mais intéressant.

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