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Esa-Pekka Salonen dirige l’Orchestre de Paris dans Sibelius

Régulièrement invité à diriger la phalange parisienne, le chef finlandais déroule un programme contrasté, totalement dédié à mettant en miroir la très lyrique Symphonie n° 6 et la minérale Symphonie n° 7, ultime étape de son corpus symphonique.

C'est un concert qui sonne, de prime abord, comme une évidence tant Sibelius, après un début de cohabitation difficile, semble inscrit dans les gênes d'. Mais cette proximité quasiment atavique ne serait-elle pas, en définitive, que pure illusion? L'intégrale des symphonies donnée en 2007 avec l'Orchestre Philharmonique de Los Angeles n'a, hélas, pas levé tous les doutes. On sait les interprétations de Salonen très littérales, gravées à la pointe sèche, sans théâtralité excessive et d'une grande beauté formelle à laquelle certains ont pu reprocher une relative froideur et une distanciation abusive.

Contre toute attente, le concert de ce soir apporte un flagrant démenti à ces réserves. La Symphonie n° 6 (1923) séduit d'emblée par sa fluidité, par sa beauté mélodique, comme par l'homogénéité du discours ou la clarté de sa polyphonie. Après une entame très lyrique des cordes, l'Allegro s'anime sur une mélodie limpide et bouillonnante où interviennent la harpe et la petite harmonie (Alexandre Gattet au hautbois, Pascal Moragues à la clarinette et Vincent Lucas à la flûte), avant un Allegretto rendu plus attentiste par ses cordes lancinantes, méditatif plus que poétique, sur lequel se greffent quelques menaces cuivrées et où l'on apprécie la beauté des contrechants. Le Poco Vivace impressionne par sa rigueur rythmique, comme par sa dynamique plus conquérante (cordes, cuivres, petite harmonie) précédant un Finale joué enchaîné, plus complexe, qui évolue par vagues successives alternant tension et détente, chargées de nuances et de contrastes.

Volontiers qualifiée de minérale, ne comprenant qu'un mouvement unique, la Symphonie n° 7 (1924), épique, majestueuse et solennelle, entraîne quant à elle une adhésion immédiate par sa profondeur d'intonation. en gomme à l'envi le caractère granitique et statique par un phrasé haut en couleurs, une dynamique enlevée et des transitions subtiles (trombones et timbales), entre épisodes élégiaques et moments plus passionnés, dans une succession de flux et de reflux durant lesquels la musique se nourrit d'elle-même et se métamorphose, recrutant tous les pupitres, avant de se résoudre au silence… Un silence que Sibelius ne quittera plus.

Crédit photographique : © Nicolas Brodard

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