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Brahms source de trois créations pour L’Ensemble Des Équilibres

Commandes de l', trois œuvres de , et composent le programme de ce disque, en écho aux trois sonates pour violon et piano de . Plus qu'un hommage, une musique de notre temps qui tisse ses liens avec celle du passé. 

Après leur disque consacré aux trois sonates pour violon de Weinberg, la violoniste Agnès Pyka et le pianiste Laurent Wagschal, piliers de l', retrouvent leur duo dans ce projet original et audacieux. Brahms en est le point de départ, source d'inspiration proposée aux compositeurs avec pour chacun la tâche d'écrire une œuvre en miroir à l'une de ses trois sonates. À l'instar de Brahms « le progressiste » (qualifié ainsi par Schoenberg) nourri de la musique du passé dont les formes anciennes sont le socle de son langage novateur, il s'agit pour eux de démontrer « au public la continuité et l'unité de la musique », qui ne se créée jamais ex nihilo. 

Regenlied de se réfère au thème du dernier mouvement de la Sonate pour violon et piano n° 1 en sol majeur op.78, emprunté au lied éponyme. La pièce d'un seul tenant est une succession de variations, ce qui n'est pas sans rappeler les nombreuses œuvres de Brahms élaborées de la sorte. Hersant épuise le motif mélodique de cette « sonate de la pluie », proposant diverses incursions expressives depuis la sombre et mélancolique mélopée du violon d'inspiration tzigane jusqu'à sa lumineuse fin s'évaporant dans une pluie de notes irisées au piano sous les harmoniques du violon. La liberté de l'écriture ciselée, la palette d'éclairages, de couleurs, le lyrisme permanent du violon, dans ses solos ou sur la partie soutenue du piano, la respiration même de la pièce captivent d'un bout à l'autre.

Quoiqu'aussi d'un seul tenant et d'une durée équivalente, prend un autre parti dans In Anlehnung an Brahms, inspirée de la Sonate n° 2 pour violon et piano en la majeur op.100. Ici la douceur et la paix dominent, semblables à l'atmosphère qui nimbe cette sonate, dans un langage tendant à l'appartenance tonale. Le lyrisme y unit les deux instruments dans un dialogue constant se revendiquant de l'esprit brahmsien, disons plutôt « à la manière de… ». Cependant l'œuvre n'a pas le souffle expressif que l'on reconnait au compositeur allemand. Une figure thématique créée par Bacri à partir de la devise de la fameuse Sonate F.A.E. donne lieu à un développement dont les longueurs par moments lassent. Cette pièce non dénuée d'intérêt pêche cependant par une imagination trop en retrait.

La Sonate Winternacht de , en miroir à la Sonate n° 3 pour violon et piano en ré mineur op.108, possède une verve et une énergie considérables. La compositrice reprend à son compte la forme en quatre mouvements analogues : Allegro, Adagio, Cantabile (qui renvoie au « un poco presto e con sentimento »), presto. Elle attrape ici et là un bout de thème qu'elle utilise comme autant d'images subliminales, parfois reconnaissables. A partir de ces éléments, sa sonate apparaît tel un double, dont l'originalité n'a d'égal que la profondeur et l'invention. L'œuvre fascine par sa pâte sonore, la richesse de ses textures, de ses harmonies, de ses thèmes ; sa musique nous prend dans son mouvement, son intensité, ses états intérieurs successifs. Une œuvre forte à la tonalité sombre, saisissante et passionnée ! 

On saluera l'initiative heureuse de ces deux interprètes, par laquelle le répertoire de notre siècle s'enrichit de nouvelles pages musicales, qu'ils font vivre au disque avec une inspiration incontestable et une absolue fidélité, fruit d'un travail avec leurs compositeurs.

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