- ResMusica - https://www.resmusica.com -

Laurence Equilbey dépoussière le Freischütz de Carl Maria von Weber

Pour son nouvel opus discographique et vidéographique, accompagnée de ses troupes de l' et du Chœur a choisi de se consacrer au Freischütz de .

Comprenant un CD (sans dialogues) et un DVD, ce « Freischütz Project » retient les meilleurs moments de la production donnée en octobre 2019 par la Compagnie 14:20 au Théâtre des Champs-Élysées.

Il faut bien reconnaitre que la mise en scène de cet opéra fantastique peuplé de fantômes n'est pas chose aisée, souvent empêtrée dans une scénographie et des costumes germanisants d'un kitsch avéré. Rien de tout cela dans la mise en scène « high tech » de , riche en effets spéciaux, balles lumineuses, hologrammes, vidéo judicieuse, danseur en apesanteur (Clément Davin). Le tout évolue dans un contexte intemporel et mêle avec succès humour et noirceur angoissante, redonnant ainsi un véritable coup de jeune à ce superbe opéra quelque peu délaissé par les scènes françaises.

À l'attrait de cette mise en scène particulièrement réussie et véritablement innovante, s'ajoute, bien sûr, la musique. Fosse et plateau sont ici en parfaite symbiose grâce à la direction de qui tire élégamment son épingle du jeu par l'utilisation d'instruments d'époque face aux versions discographiques de référence de Carlos Kleiber (DG) ou Nicolaus Harnoncourt (Warner) sur instruments modernes. Là encore, force est de reconnaitre que le contexte s'y prête favorablement : ambiance chambriste et intimiste, richesse des timbres, couleurs orchestrales avivées, rusticité des cuivres, sonorité des cordes, dynamique réactive et équilibrée.

À l'appui de cette belle prestation musicale et scénographique, la distribution vocale de qualité et homogène, composée de chanteurs effectuant tous leur prise de rôle, vient compléter le tableau. campe un Max très crédible physiquement et vaillant vocalement, avec de jolies et périlleuses nuances dans « Durch die Wälder… » bien que son engagement scénique soit souvent limité (la direction d'acteurs est assurément le maillon faible de cette production). (Agathe) séduit, quant à elle, par son timbre mordoré, son ambitus large, son vibrato bien contenu, son souffle inépuisable et son sublime legato. Sa cavatine du III : « Und ob die Wolke sie verhülle » avec accompagnement de violoncelle et de clarinette est un grand moment d'émotion ! Face à elle, interprète une Ännchen pleine de vie, complice et insouciante, dont le timbre plus acidulé s'apparie joliment avec celui plus mat d'Agathe (duo du II : « Schelm! Halt fest! »). étincelle de son baryton plein de noirceur. Le reste de la distribution ne démérite pas : (L'ermite), Thorsten Grümbel (Kuno), Daniel Schmutzhard (Ottokar) ou encore (Killian). Le Chœur , à son habitude, est irréprochable de bout en bout, à l'instar de l' (vents, cordes graves et timbales).

Cette production « historiquement informée », semble actuellement la seule disponible… constituant à ce titre une incontournable référence.

 

Lire aussi notre compte-rendu de cette production donnée au Grand Théâtre de Luxembourg :

Le Freischütz dématérialisé de Clément Debailleul, Raphaël Navarro et Laurence Equilbey

(Visited 786 times, 1 visits today)