- ResMusica - https://www.resmusica.com -

Anton Bruckner revisité par Thilo Muster à l’orgue de Dudelange au Luxembourg

Transcrire pour l'instrument à tuyaux une symphonie de Bruckner, quoi de plus logique quand on connait la vie de ce grand musicien, lui même organiste du monumental instrument de l'abbaye de Saint-Florian. , sur une proposition d', offre une passionnante approche sur l'orgue symphonique de Dudelange au Luxembourg.

occupe une place de choix dans le romantisme allemand avec à son actif neuf symphonies pour orchestre. Sa dernière fût commencée en 1887, il y travailla jusqu'en 1896 l'année de sa mort, laissant le final inachevé. On retrouve comme souvent chez ce compositeur un premier mouvement à l'atmosphère mystérieuse reposant sur plusieurs thèmes alternant des épisodes tendus avec d'autres plus sereins. Le scherzo représente un moment des plus fascinants, comme le montrent certaines versions orchestrales, dont celle de Wilhelm Furtwängler en 1944. Il y a là un discours terrible, comme un martèlement incantatoire. L'adagio suivant qui tient lieu de final apporte un apaisement, extatique, comme un grand choral…

La transcription à l'orgue apporte à l'écoute une relecture totale de l'œuvre. Sans se méfier, on pourrait même croire à une symphonie pensée pour cet instrument dès le départ. Cela éclaire peut être sur la manière dont composait et se servait de sa connaissance approfondie du monde mystérieux de l'instrument à tuyaux, devenu alors symphonique et si proche de la pâte orchestrale de la fin du XIXᵉ siècle. Les orgues allemands encore plus que les français apportent ce climat complètement propice à la musique de Wagner, Bruckner ou Mahler. A ce titre, l'orgue luxembourgeois de Dudelange convient parfaitement à l'œuvre enregistrée. Il fut construit en 1912 puis agrandi en 1962 et 2002. Son noyau sonore remonte à l'époque de Bruckner, augmenté depuis pour présenter aujourd'hui sur 4 claviers et pédalier une somme de 72 jeux, avec une transmission électrique des notes et des tirants de registre. Un combinateur permettant la mise en mémoire des divers mélanges offre un confort d'exécution non négligeable.

Grâce aux intenses travaux du musicologue et musicien concernant la musique de Bruckner et la manière de la transposer à l'orgue, Thilo Munster s'est rapproché de ces nouvelles partitions qui jettent un regard nouveau sur ces fresques symphoniques. Il a donné en concert à de nombreuses reprises la Symphonie n° 9, avant d'envisager sa gravure sur disque. Mûrement réfléchie son interprétation tient du défi, tant il parait ardu de remplacer cent musiciens par un seul. Le résultat est à la hauteur de l'attente, le jeu est profond, posé, jamais virtuose dans le sens de démonstratif, et l'intégration des parties orchestrales nombreuses demeure un tour de force parfaitement réussi et convaincant. Le scherzo est particulièrement impressionnant par son élan, comme une course à l'abîme ça et là parsemée de larges respirations. La prise de son assez globalisée contribue à traduire les divers climats qui parcourent la symphonie.

(Visited 478 times, 1 visits today)