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L’ensemble Los Temperamentos, entre deux temps pour leur nouvel opus

Sous l'intitulé « Entre dos tiempos », l'ensemble de musique ancienne Los Temperamentos propose dans cet album un programme aux choix interprétatifs un peu trop lisses.

Que de difficultés pour comprendre la thématique de cette proposition discographique de l'ensemble de musique ancienne Los Temperamentos. Et ce ne sera pas la notice de ce disque qui nous facilitera la tâche ! Quand on connaît la direction artistique choisie par le violoncelliste , on serait plus enclin à s'imaginer une rencontre culturelle entre peuples colonisés et colonisateurs, affirmée à la fin de l'explication donnée par les artistes dans le livret. C'est ce que pourrait retracer la Suite Indígena, un regroupement par l'ensemble instrumental d'une vingtaine de compositions extraites du Codex Trujillo qui décrit la vie quotidienne des peuples du Pérou entre 1780 et 1790, notamment une danse du chimo de Martínez y Compañón venant des cultures pré-incas, ou encore deux cachuas mêlant langue castillane et celles des peuples autochtones à la gloire de l'Enfant Jésus et de la Nativité.

Mais avant d'arriver à cette idée, Los Temperamentos nous parle avant tout d'un voyage dans le temps, entre l'art de la musique de la Renaissance et celui de la musique Baroque. L'exemple de la Chaconne pourrait être révélateur de cette démarche, entre celle de (1713-1784) qui contraste soi-disant avec celle de (1686-1739). Mais comment mettre en lumière cette résonance, entre l'extravagance toute italienne du violoncelle du premier et le traverso typiquement français du second, lorsque les deux pièces sont si éloignées dans la programmation (piste 1 pour celle de et piste 15 pour celle de Canavas.). Et alors que l'ensemble est connu pour ses interprétations historiquement informées, aucune explication n'est donnée sur le choix du traverso et l'enrichissement des interventions de percussions pour la seconde Chaconne extraite d'une collection de Sonates pour flûte à bec (Sonate XII op. 2).

Cette disposition des pièces, ou peut-être même le choix de certaines, affaiblit ce « paradoxe » franco-italien tant annoncé par les protagonistes, « Entre dos Tiempos » étant également présenté comme un moment historique exprimé musicalement de façon très différente selon les divers endroits du monde qui l'évoque. Voilà encore une autre directive d'une thématique peu lisible. Cette « confrontation » ne se retrouve pas dans l'expressivité de l'interprétation, les instrumentistes déroulant une exécution assez lisse et conventionnelle, sans aspérités. Ce paradoxe n'est ainsi ni perceptible dans la Quatrième Sonate du troisième livre de (pistes 2-5) où le violoncelle se trouve le signe d'un nouveau langage, ni dans la Douzième Sonate académique pour violon de (pistes 8-12) où la brillante technique typique du violon italien se déploie ; ces pièces sont pourtant symptomatiques de cette contradiction selon la notice.

Le plus frustrant, et le plus étonnant est de ne pas trouver immédiatement quelques œuvres évoquées dans le texte de présentation : pour la pièce Cachua La Despedida et la pièce Tonada La Brujita, il faudra se référer à la programmation détaillée plutôt qu'à la pochette du disque, tout comme pour polo Margariteño, idem pour la tonada El conejo…

D'une opposition franco-italienne, il semble que l'on passe ensuite d'un « paradoxe » entre musique populaire et savante, tourné vers l'Espagne et l'Amérique latine. Mais l'écho entre Xácara de Juan Francés de Iribarren (1699-1767) et la Canzonetta Spirituale de Tarquinio Merula (1595-1665), souffre de nouveau d'une disposition inopportune : que de musique passée entre la piste 7 et la piste 16 pour que ce contraste puisse marquer l'auditeur.

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