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Le violoncelle d’Edgar Moreau chante divinement l’âme musicale juive

Dès l'abord précise son souhait de transmettre la musique hébraïque dans ses dimensions universelles.

L'interprétation juste et engagée du jeune violoncelliste ainsi que le soutien de l'Orchestre symphonique de Lucerne parfaitement et délicatement dirigé par , magnifie ces œuvres hautement inspirées. Nul doute que les propres origines juives du soliste ont impacté l'intensité et la sincérité de ses interprétations ainsi que son souhait artistique de transmission d'un legs incontournable. Plus largement, le choix des musiques retenues contribue à rendre précieux cet enregistrement réalisé avec toutes les qualités souhaitables que le soliste offre à son instrument manié avec précision, mesure et intensité.

À l'évidence la Rhapsodie hébraïque Schelomo bénéficie de ses dispositions et gagne en robustesse, affliction et véhémence tout en se dispensant de certaines attirances et dévoiements romantiques. Créée en 1917, l'œuvre d' est l'un des sommets rhapsodiques de la musique occidentale. Son Lento moderato initial propose un développement patient, retenu et lyrique aboutissant à un sommet orchestral fabuleux. L'Allegro moderato tonique maintient la tension avant de retrouver dans son Andante moderato final inoubliable l'atmosphère embrasée du premier mouvement.

Kol Nidrei de , composé en 1880, impressionne avec ses trois mouvements quasi cycliques et par sa méditation paisible illustrant la grande fête de Yom Kippour. La sobriété et la retenue des intervenants intensifient cette partition apaisée.

Korngold, autrichien émigré à Hollywood (USA), élabora son Concerto pour violoncelle en trois mouvements en 1946, lui conférant un brillant non dénué de virtuosité et une richesse mélodique et harmonique de premier rang que Moreau et Sanderling servent avec excellence.

De la vie juive de Bloch, datant des années 1924-1925, déroule une profonde tristesse (Prière : Andante moderato) inspirée par des chants juifs, laquelle s'accentue dans une Supplication proche du désespoir. Enfin la Chanson juive s'apparente à la tradition yiddisch propre à l'Europe de l'Est.

Les Deux Mélodies hébraïques de illustrent sa grande curiosité (d'abord destinées au duo voix et piano en 1914 et cinq ans plus tard orchestrées). Le soliste aborde la partition du Français avec un soucis d'introspection lui accordant une grande dignité dans la partie Kaddisch (Lent) rarement soulignée à ce degré et amplifiée dans le Tranquillo de l'Enigme éternelle.

Parmi les nombreuses références discographiques nous citerons l'enregistrement récent et réussi (Bloch et Bruch) de Dominique de Williencourt avec la Camerata Orphica dirigée par Georgi Dimitrov (Europ&Art). La lecture de Leonard Bernstein de Schelomo avec Mistslav Rostropovitch et l'Orchestre national de France (EMI, 1976) ne manque pas de panache même si légèrement plus démonstrative. Bien sûr, la version CPO (2018) de Raphael Wollfisch du Concerto de Korngold demeure un sommet inégalé. Quant à Kol Nidrei on n'oubliera pas la prestation historique de Pablo Casals (Warner, 1936).

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