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Auf dem Gebirge de Pina Bausch entre au répertoire du Ballet de l’Opéra de Lyon

La pièce dansée, Auf dem Gebirge hat man ein Geschrei gehört (« Sur la montagne, on entendit un hurlement ») de la très grande entre au répertoire du Ballet de l'Opéra de Lyon, 38 ans après sa création. 

Pina, alias Philippina, Bausch, la chorégraphe visionnaire, qui révolutionna la danse contemporaine en Allemagne dans les années 70, puis dans le monde, inventa des techniques de danse-collage et théâtrale. Aujourd'hui, c'est le danseur et chorégraphe associé , qui fut un des piliers de la compagnie, qui a participé (du haut de son grand âge) aux répétitions de cette seconde « première » de Auf dem Gebirge hat man ein Geschrei gehört créée en 1984 à Wuppertal.

Cette pièce dansée magnifique, longue, déjà pour l'époque, 2h20 exactement, est une version copier-coller post-moderne de la vie fantasmée, rêvée, vécue et toujours fictive. Quand un danseur dit « entr'acte », c'est évidemment l'entracte. Et la danseuse, que représente en femme, telle qu'elle était jadis stéréotypée, soumise, figée, les yeux fermés ; la danseuse, reste sur scène pendant cet interlude vivant. Toute la pièce est dansée et jouée par les danseurs-comédiens, qui ont été si bien guidés, en toute conscience. Les danseurs doivent être épuisés par ce marathon qu'est cette pièce-chorale, si dense qu'elle ne peut être décrite sans être « trahie » ; un danseur tient sur le temps de la pièce dansée, à la fois très intellectuelle et très physique. C'est une prouesse-marathon pour les danseurs, un combat de coqs, de boxe, de femmes fortes et fragiles, somnambules, aveugles-voyantes écrivant dans le noir leurs histoires de vies ; et d'hommes aussi, bref de danseur(e)s, ayant plusieurs vies, tels les chats.

en signe la dramaturgie ; le danseur et chorégraphe mort en mai 2021, qui a joué aussi et mis en scène ensuite sa carrure bossue au centre de son œuvre, a épaulé pendant dix ans. Il écrivait dans ses notes préparatoires, qui décrivent exactement ce que Pina Bausch a mis en scène (Probennotizen), ceci par exemple : « Une femme tient une robe à bout de bras, la plie ensemble et dit, qu'elle prend toujours une robe de soirée pour voyager, et espère pouvoir entretemps la porter une fois ».

Sur scène aujourd'hui apparaît le danseur en maillot de bain et pince-nez de piscine qui le gardera tout au long du spectacle comme jadis. Son maillot est rose fluo, bonnet de bain en silicone, de même couleur, muscles sous la peau, saillants. Nager, courir, sauter, grimper au mur, tous les items de Pina Bausch sont dans cette pièce iconique du théâtre dansé. Ce sont des femmes qui marchent sur les murs à la verticale en dormant, somnambules, portées, elles si légères, par des danseurs, si forts, si calés, des hommes qui font n'importe quoi « pour de rire », mais qui portent aussi douloureusement, sans en avoir l'air.

Pina Bausch fut une femme élégante et écrivait (et disait sans doute) : « Dansez, dansez, sinon nous sommes perdus ». Voir pour croire aujourd'hui encore que « Sur la montagne, on entendit un hurlement » est une pièce dansée-chorale qui se transforme en fanfare, alors que quinze musiciens « envahissent » la scène en dernière partie de spectacle.

Crédits photographiques : © Jean-Louis Fernandez

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