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Andris Poga accompagne Nina Stemme à l’Elbphilharmonie

À Hambourg, prend pour deux soirs la direction du et accompagne dans les Wesendonck-Lieder de Wagner, avant de diriger une splendide Symphonie n° 15 de Chostakovitch.


Seul chef à avoir gagné le premier prix du Concours Svetlanov, débute cette rentrée par l'Elbphilharmonie pour y conduire l'orchestre maison, celui de la NDR auquel la salle a maintenant été ajouté à la dénomination. Dans cette atmosphère toujours aussi magique, décriée par une partie des Hambourgeois pour son coût (un milliard d'euros) et le fait que certaines places des balcons n'atteignent pas la qualité sonore exigée, le concert du soir débute par Wagner, avec la plus grande Isolde de la décennie passée.

entre sur scène avec le chef, pour venir se positionner à sa gauche, mais derrière les violons, d'où elle porte les cinq Wesendonck-Lieder. Sur un accompagnement soigné du dès le premier lied, Der Engel, elle fait d'abord état d'un vibrato relativement marqué, jusqu'à ce que la voix s'échauffe pour Stehe still!, emmenée par des musiciens dont Wagner fait partie de l'ADN. Le chef agence l'ensemble sans y apporter une forte personnalité, laissant chacun développer ses belles sonorités, sans doute avec une approche trop douce pour faire ressortir toute la puissance d'Im Treibhaus, qui trouve une soprano à présent totalement libérée, jamais en difficulté ni pour les premières phrases du bas de sa tessiture, ni ensuite aux aigus forte, très bien projetés dans la grande philharmonie marine. Träume présente les mêmes qualités, porté par Stemme et bien accompagné par des cordes soyeuses. On regrette juste que les applaudissements d'une partie du public entre chaque lied cassent quelque peu la concentration et l'impact émotionnel du cycle.


En deuxième partie, passé un verre de vin au nom et à l'étiquette de l'Elbphilharmonie, qui montre à quel point le marketing a été travaillé autour de la salle, on retrouve un orchestre de la NDR plus fourni pour aborder cette fois une œuvre plus dans le sang du chef letton que de la formation hambourgeoise. Et si le marketing a ses qualités pour remplir une salle et aiguiser la curiosité de gens qui ne seraient jamais allés à un concert classique, il a aussi pour défaut de n'attirer une partie de ce public que pour la salle, au risque de profondément l'ennuyer avec une partition aussi minutieuse que la Symphonie n°15 de Chostakovitch. Heureusement silencieux, certains ne peuvent pour autant masquer une certaine fatigue et en plus de continuer à applaudir entre les mouvements, ce qui est à présent un parfait contresens, tout particulièrement après le Largo, une poignée tentent de s'éclipser après l'Allegretto, mais se fait refuser la sortie et reprend donc sa place, avec des déplacements bien visibles de tous les autres spectateurs. Sans en arriver à l'exaspération récente de Nezet-Séguin, qui avait dû s'interrompre ici en mai dernier, garde son flegme et tente de rester imperturbable, bien qu'on le sente las pendant les interruptions et quelque peu déconcentré au début du finale.

Dommage pour l'auditeur intéressé, qui aux solos du premier trombone près, peut sinon se passionner pour l'interprétation du chef-d'œuvre russe par Poga. Fin à l'introduction, il sait apporter l'exacte mesure de grotesque au premier solo de basson, puis dans les citations du célèbre thème de l'Ouverture de Guillaume Tell de Rossini, avant d'emporter l'ensemble vers une ample déploration au Largo, sans jamais trop exagérer le vibrato des magnifiques premiers violoncelle, violon et alto. Difficile de comprendre ensuite ce qui a pu arriver au trombone, mieux caché lors des parties groupées que lors de ses deux longs solos, dont les nombreuses fausses notes et le manque de netteté sont particulièrement mis en exergue par le fait que ce mouvement est pris dans un tempo très lent. L'Allegretto redonne de la place aux bois, superbes avant l'intervention racée du premier violon, puis un soutien de plus en plus massif du reste de l'orchestre.

Aussi bien abordé, le finale expose d'abord d'excellents cors et trompettes, pour s'étendre lui aussi sur un tempo très mesuré, bien que toujours empreint de lumière et de soyeux jusqu'aux derniers instants, magnifiquement traités par les percussionnistes, dont les deux xylophones splendides jusqu'à la dernière note.

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