- ResMusica - https://www.resmusica.com -

Danses pour une actrice (Jolente de Keersmaeker) par Jérôme Bel

Au Théâtre de la Bastille, crée pour et avec l'actrice belge un nouveau portrait dansé. Généreux et libre, à l'image de cette exceptionnelle interprète.

n'est pas une danseuse, elle est actrice. Fondatrice de tg STAN, collectif d'acteurs belges qui fait régulièrement les beaux jours du Théâtre de la Bastille, elle a joué tour à tour Ingmar Bergman, Anton Tchekhov, Yasmina Reza ou Tiago Rodrigues. Fruit de sa rencontre avec , qui continue de mettre en scène avec sobriété des portraits dansés, Danses pour une actrice () est un merveilleux cadeau pour les spectateurs qui la connaissent, comme pour ceux qui ne l'ont jamais vu jouer.

Que se passerait-il si une actrice qui n'a pas la maîtrise de la danse interprétait une chorégraphie à partir de son imaginaire, se sont-ils ensemble demandés ? Mais avant de répondre à cette question, l'actrice se lance bravement dans ce qui reste de ses années de danse quand elle était enfant. Barre, diagonale, milieu, rien ne lui fait peur. C'est maladroit, mais sincère. Puis elle raconte l'histoire de sa rencontre avec , « performe » le programme jusqu'aux mentions obligatoires, avant d'expliquer les convictions écologiques de la compagnie, qui a renoncé depuis trois ans à prendre l'avion pour ses tournées et ne distribue plus de feuille de salle. Doctement, elle nous apprend qu'1,1 kwh d'électricité sera consommé pour ce spectacle, soit l'équivalent d'une heure à passer l'aspirateur.

Pour nous mettre en appétit, Jolente de Keersmaeker commence par danser le Prélude d' chorégraphié en 1905, faisant écho à la conférence dansée que Jérôme Bel avait consacré à avec Elisabeth Schwarz en 2019. On se souvient encore de ces gestes symboliques manifestant des émotions.

Jolente de Keersmaeker improvise ensuite d'après une vidéo de dans Café Muller en 1978. C'est une bouleversante interprétation de la douleur universelle sur Didon et Énée de Purcell, suivie d'une non moins bouleversante improvisation du tube Diamonds de Rihanna, daté de 2012. On rit, on pleure, c'est formidable d'émotion.

L'actrice poursuit avec un hommage littéralement extraordinaire à et à son propre père, avant de faire travailler notre imagination en décrivant des images de la pièce Huddle de , une construction dansée de 1961, puis manque de nous faire mourir de rire en mimant un extrait de Saturday Night Fever de Leister Wilson, film sorti en 1977, dansant à la place de .

En guise d'épilogue, l'actrice devenu danseuse par la magie de ce spectacle, livre sa propre improvisation baptisé Alfarim, achevant dans la paix cet exceptionnel moment partagé.

Crédits photographiques : © Herman Sorgeloos

(Visited 652 times, 1 visits today)