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Le piano de Boris Berman bouleversant dans Silvestrov et impérial dans Brahms

Ce concert, trop confidentiel mais remarquable, rend justice à l'art irréprochable du pianiste et aux deux compositeurs retenus au programme, et .

La première partie, présentée par notre confrère Stéphane Friédérich, fidèle à son percutant esprit de synthèse et à son enthousiasme communicatif, revient donc à Silvestrov dont la fuite depuis son Ukraine natale vers Berlin en février 2022 avait profondément ému.

, par le biais d'un choix judicieux de quatre pièces parfaitement maîtrisées, déroule autant de périodes créatrices du compositeur détenteur d'un catalogue aussi riche que varié. Signe, issu de Triade, composé durant la période 1961-1966 et révélatrice de son intérêt pour le dodécaphonisme d'après-guerre, ne se dispense nullement d'un supplément d'âme parfaitement perceptible qui restera une constante de l'ensemble de son catalogue. Une décennie plus tard il élabore sa Sonate n° 2 en un seul mouvement (1975) où l'on perçoit des influences venues du passé (diatonisme) et une fibre expressive infiltrant la partition en dépit de l'utilisation de son travail percussif sur la table d'harmonie, installant un climat parfois mystérieux et captivant. Un pas supplémentaire vers une représentation de la voix de l'âme romantique caractérise les Cinq Pièces de 2021, à la fois miniatures, bagatelles, tonales, révélant un créateur sincère, virtuose et attentif au passé, mélancolique sans doute mais maître de son destin créateur. Pour finir, le public découvre ses récentes Trois Pièces écrites à Berlin en mars 2022 et dédiée à dans lesquelles Silvestrov s'élève vers des hauteurs rares où se mêlent de manière idiosyncrasique, douleur et colère, présent douloureux et proximité des espaces infinis.

La seconde partie de la soirée est consacrée à Brahms, un compositeur particulièrement proche au cœur du pianiste qui excelle dans ce registre où ses interprétations ont conquis et ravi les publics au concert et à l'enregistrement. Une excellence confirmée ce soir par l'incroyable démonstration de virtuosité, d'intensité et d'aisance apparente que le public ne fut pas surpris d'entendre après l'introduction passionnée de Stéphane Friédérich. On se souviendra longtemps encore de la fougue rythmique étincelante et inextinguible qui embellit les Variation sur un thème original en ré majeur créées à Copenhague en mars 1868.

Le concert est produit par le label Le Palais des dégustateurs qui publie en même temps deux albums consacrés à Silvestrov et Brahms par Boris Berman.

Crédit photographique : © David Marmier

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