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Giya Kancheli, formidable mélodiste et créateur de climats singuliers

Disparu en octobre 2019, connu principalement pour ses symphonies et ses merveilleuses partitions orchestrales et vocales, Kancheli brille aussi dans le registre plus intime de la musique de chambre.

Le catalogue du Géorgien se décline en trois registres principaux : la musique composée pour accompagner le cinéma et le théâtre, la musique dite sérieuse et enfin une musique légère, issue du premier groupe, dont le succès international fut une réelle surprise par sa diffusion et son impact sur des publics fort différents.

se montrait habituellement très exigeant quant au respect scrupuleux de l'interprétation de ses œuvres. Mais lorsque, tardivement, il regroupa les airs majeurs de sa musique de scène et de film, oubliés depuis fort longtemps, il encouragea sans ambages ses interprètes à habiller et jouer, comme ils le souhaitaient, ses miniatures (2014). Et nombreux furent ceux qui les illustrèrent par le biais d'un effectif varié et s'autorisèrent aussi diverses modifications… sans pour autant défigurer l'esprit fondamental de ces musiques. Sous le titre initial de Miniatures (puis plus tard de Lettres pour les amis), plusieurs moutures requérant le piano seul furent largement diffuées : citons Georges Vatchnadze (Piano Classics), (Dreyer gaido) et Ketevan Sepashvili (Granola). D'autres associations instrumentales attachantes font appel à la flûte, au bandonéon, au vibraphone, à l'accordéon…

Le présent enregistrement revient à deux musiciens vivants en Afrique du Sud. Dans cette version pour duo violon et piano, ces très courtes 18 Miniatures ont déjà été magnifiquement illustrées par et Marco Venturi pour Brilliant Classics (2015).

Chaque pièce est intitulée par son tempo relié aux œuvres pour lesquelles elle fut composée initialement. Le compositeur ne reprend que peu de mesures, une sorte de synthèse en somme, sans reproduire intégralement la partition d'origine. On y découvre un maître de l'atmosphère, qu'elle soit lyrique (Lontano ; Cantabile, rubato) ou dissonante (Con energia, secco), mélancolique (Dolchissimo) ou dégingandée (Grazioso ; Marcatto, secco), individuelle (Cantabile) ou regardant vers le passé (Con energia, secco)… On n'y trouvera pas de démonstrations ambitieuses mais des portions d'atmosphères qui ravirent interprètes et auditeurs.

Le cas du Trio Middelheim pour violon, violoncelle et piano se distingue sensiblement des Miniatures. Il date de la fin de la vie de Kancheli marquée par de sévères problèmes de santé notamment au niveau cardiaque. Plusieurs hospitalisations et un arrêt cardiaque dont il réchappa de justesse à l'hiver 2016, grâce aux médecins de l'hôpital Middelheim à Anvers, l'incitèrent à manifester sa profonde reconnaissance en élaborant ce Trio qui ne vit le jour qu'en 2021 dans sa ville natale de Tbilissi. Une version antérieure pour trio et orchestre à cordes avait été présentée au public en 2018 (Cortesi et les Cordes géorgiennes, Brilliant Classics), quelques mois avant sa disparition. Présentement, chez Delos, il s'agit apparemment du premier enregistrement mondial de ce trio, honnêtement défendu par ses interprètes.

Kancheli bâtit sa musique (17 minutes), comme souvent, sur l'élaboration de dualités forte-piano d'une part et cris de révolte- élans lyriques touchants de l'autre. Middelheim ne déroge pas à ce schéma et charme, à l'écoute, par la perception d'une authenticité caractéristique de l'homme et de son œuvre.

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