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Simon Rattle et l’Orchestre de la Radio bavaroise : de prometteurs débuts dans Mahler

Pour ce premier enregistrement discographique avec son nouvel orchestre de la Radio bavaroise Sir nous livre une belle lecture, empreinte d'une grande maturité, de la Symphonie n° 9 de .

Cet album marque le premier jalon discographique de la collaboration entre et le BRSO dont il assumera officiellement la direction musicale à compter de cette année 2023, succédant au regretté Mariss Jansons. Cet orchestre a depuis de nombreuses années une lourde hérédité mahlérienne argumentée par une splendide intégrale conduite par Rafael Kubelik, sans oublier des enregistrements live d'exception de la Neuvième de Mahler avec ses précédents directeurs, qu'il s'agisse de Bernard Haitink en 2012 ou Mariss Jansons en 2016.

entretient depuis les années 80 des affinités tenues avec le corpus symphonique de . En témoigne une quasi-intégrale menée avec l'Orchestre Symphonique de Birmingham, complétée avec les Philharmoniques de Vienne (9ème en 1996) et de Berlin (5ème en 2002).

En 2007, il réenregistra une seconde version de la Neuvième de Mahler avec le Philharmonique de Berlin, ainsi le présent enregistrement avec la Radio bavaroise constitue-t-il la troisième mouture de l'ultime symphonie achevée de Mahler par le chef.

Si la version de 1996 avec Vienne se caractérisait, de façon un peu schématique, par son côté quelque peu sauvage en regard de la seconde avec Berlin en 2007, peut-être plus froide et distanciée, cette dernière lecture avec la phalange bavaroise bénéficie d'un approche plus consensuelle, plus authentiquement mahlérienne et plus mature, confortée par l'exceptionnelle plasticité de l'orchestre bavarois.

Lieu de toutes les craintes et de tous les dangers par son mélange de lyrisme et de violence, d'inquiétude et de sérénité, partagé entre urgence et attente fiévreuse au sein d'un éparpillement de timbres et de mélodies tronquées où la mort rode, le premier mouvement Andante Commodo est abordé avec sérénité et une grande hauteur de vue sans en éluder cependant l'impact émotionnel et l'expressivité. Dans un discours magistral et tendu où la transparence orchestrale (quasi chambriste), la clarté des plans sonores et les performances solistiques impressionnent, Rattle parvient avec maestria à fédérer tout ce qui est épars en un tout cohérent, porté par nombre de nuances rythmiques et dynamiques et de subtiles transitions.

Introduit par un basson goguenard, le deuxième mouvement séduit également par la clarté de sa mise en place, entrelaçant dans une architecture complexe, un ländler d'une savoureuse rusticité, une valse bringuebalante et un ländler conclusif chargé d'inquiétude.

Ne perdant jamais le cap, conduit avec autorité dans une progression inexorable portée par une polyphonie d'une exceptionnelle richesse, à la limite de l'éclatement, le Rondo-Burleske met en avant tous les pupitres de la prestigieuse phalange bavaroise chauffée à blanc, sans que celle-ci ne se départisse à aucun moment de son impressionnante cohésion.

Bénéficiant d'une lecture très originale, l'Adagio final surprend par ses options interprétatives bien différentes de celles de nombre d'autres chefs (Abbado avec Lucerne par exemple, pour n'en citer qu'un..). Loin de voir dans cet adagio, les déchirants adieux au monde, répondant aux « Ewig » du Chant de la terre, Simon Rattle se laisse conduire par un espoir stoïque, immanent, qui brave la douleur de la mort prochaine et de la séparation, sans aucun pathos, en ne considérant la Neuvième que comme un pont tendu vers… la Dixième ? dans un dernier chant d'amour pour Alma…

À défaut d'une nouvelle référence, assurément une très belle lecture et le début d'une prometteuse collaboration !

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