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Entre certitude et indétermination avec Bernard de Vienne

Réflexions, prises de position, engagement esthétique et éthique ; c'est ce que nous livre l'ensemble des écrits du compositeur qui s'échelonnent de 1981 à aujourd'hui au fil d'un texte ponctué par les toiles de la plasticienne Claude Barraud.

Le projet est ambitieux et le propos dense, abordant de front et de manière théorique des questions essentielles – Qu'est-ce que la composition ? Qu'est-ce que la forme ? – dans une longue première partie essentiellement centrée sur la pratique du compositeur et les étapes qui l'ont amené à une réflexion sur son écriture : « D'abord autodidacte… En étudiant leurs œuvres, mon travail aura consisté à saisir l'évolution stylistique des compositeurs et comprendre leurs singularité ». Compréhension, cohérence voire évidence, sont les termes qui reviennent sous la plume de l'auteur, avec ce besoin que l'on ressent chez lui d'expliciter et de clarifier les processus du faire musical. Nombre de citations de grands hommes (les femmes sont rares !) mises en exergue confortent la thèse soutenue dans le chapitre à venir : « S'accrocher au passé conduit sans le moindre effort à la sclérose – le passé est le passé » (Peter Brook). Impressionnant est le nombre de notes – jusqu'à 90 pour certains chapitres ! – qui rendent compte de cette effervescence de la pensée chez un compositeur soucieux de commenter, de creuser, d'asseoir l'idée avancée.

L'écoute, mode d'emploi

Peter Brook est de nouveau cité au début de la deuxième partie : « La seule raison que tu aies d'apprendre la musique, ce n'est pas toi, c'est pour la partager avec d'autres ». L'autorité de l'assertion dérange comme la manière qu'à de délivrer des clefs pour l'écoute et l'interprétation de ses œuvres : Comment écouter ? Qu'écouter dans une œuvre ? Comment travailler ma musique ? « Il n'y a pas de théorie : il suffit d'entendre. Le plaisir est la règle », disait Debussy…

Les quatre articles parus dans le Magazine des Arts autorisent plus de recul et offrent une perspective historique intéressante avec « L'apport des années soixante en musique ». La question est traitée sous l'angle analytique toujours, donnant un éclairage technique sur cette période charnière de l'histoire de la musique. On est sensible à la manière qu'a l'auteur d'aborder la peinture de Georges Folmer (1895-1977) au regard de la musique, s'agissant d'un peintre qui a côtoyé les musiciens et qui soutenait en peinture l'idée d'un Art spatial. Les citations reviennent ensuite en abondance, celle de Francis Bacon comme celle, sans appel, d'Ortega y Gasset : « En art, toute répétition est nulle, seule l'invention permet l'évolution »…

Listées à la fin du livre, les quelques cent-cinquante œuvres du compositeur (dont une quarantaine pour l'apprentissage) illustrent quasiment tous les genres musicaux. La quatrième et dernière partie de l'ouvrage est consacrée à onze d'entre elles couvrant la même période que les écrits. Elles nous sont révélées à travers les textes de présentation du compositeur. Dans ce choix très sélectif, on note la présence d'une transcription pour quintette à vent d'une pièce de Carl-Philipp Emanuel Bach, un des compositeurs aussi cher que diamétralement opposé à l'esthétique défendue par .

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