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Eine Messe des Lebens de Delius, un retour aux sources norvégiennes

C'est en Norvège que a eu la révélation du souffle vital nietzschéen, qui lui inspira Eine Messe des Lebens – mieux connue sous son titre anglais A Mass of Life. Retour aux sources avec cette version enregistrée à Bergen avec des forces norvégiennes, dirigée par et marquée par la prestation de

Fritz Delius, né en Angleterre d'origine allemande avait anglicisé son prénom en Frederick. Mais c'est en Allemagne qu'il avait composé son ambitieuse Eine Messe des Lebens (Une Messe de vie) qui n'a rien d'une messe et tout d'une célébration nietzschéenne de l'homme et de la vie. Œuvre aux effectifs massifs d'une heure et demie, les quatre enregistrements commerciaux existants jusque là sont tous britanniques, successivement Beecham (1953, CBS), Groves (1972, EMI), Hickox (1997, Chandos) et Hill (2012, Naxos – Clef d'Or ResMusica). Lawo propose une cinquième version, toujours dirigée par un chef, des solistes et un chœur britanniques, mais avec cette fois des chœurs norvégiens ainsi que l' dont est le premier chef invité.

À quoi tient qu'un compositeur sorte de l'oubli, ou s'élève d'une notoriété relative à un statut définitif ? Il lui faut un champion, un chef qui avec opiniâtreté et talent le défende, le fasse rayonner. Ainsi de Mahler par Berstein qui en a réalisé la première intégrale symphonique dans les années 60, de Berlioz par Colin Davis avec son fameux cycle pour Philips, de Chostakovitch par Haitink gravant les symphonies pour Decca. Ils n'ont pas été les premiers ni ne sont forcément les meilleurs, mais ils ont établi un référence qui ont fait sortir ces compositeurs de leur (relative) marginalité.

Delius a eu Thomas Beecham comme champion de première catégorie, mais sans qu'un projet éditorial construit et cohérent porte et unifie l'ensemble, et avec des chanteurs aujourd'hui datés. Des chefs de très belle tenue se sont succédé depuis, Charles Mackerras, Andrew Davis et désormais , mais de même que Berlioz n'a connu sa pleine reconnaissance que lorsqu'il a été dirigé passionnément hors de France (Beecham, Colin Davis, John Nelson), attend encore son nouveau champion et parions qu'il ne devra pas être un sujet de Sa Gracieuse Majesté. On n'oubliera certes pas Bo Holten et son cycle de grande qualité chez Danacord (à commencer par  l'album American Masterworks, Clef ResMusica), mais il n'a pas changé la donne.

Sur le plan interprétatif, cette ambitieuse réalisation s'établit en haut de la discographie, où elle tutoie la version de David Hill, car toutes deux savent allier énergie grandiose et poésie, souplesse et chaleur. Si la version de David Hill bénéficie d'une captation plus claire et dynamique, ce qui est un atout important pour ce répertoire post-romantique à l'effectif imposant, on pourra préférer la version de Mark Elder, car est un baryton plus équilibré qu'Alan Opie et a une affinité réelle pour la musique de Delius.

Ensemble, et Mark Elder ont en effet signé en 2012 la version la plus aboutie à ce jour de Sea Drift, le chef-d'œuvre absolu de Delius, avec le en concert (album édité par label de l'orchestre). Forts de la maturité acquise en dix ans, on aimerait beaucoup que les deux artistes gravent à nouveau cette pièce envoûtante, car il est à parier que le baryton y mettrait ce qu'on entend ici et qu'on n'a pas tout à fait dans son Sea Drift, un chant qui dit le texte.

Une parution importante dans la discographie délienne.

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