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Les Frivolités parisiennes, irrésistibles dans Gosse de riche

Cent ans après sa création, Gosse de riche, comédie musicale de , réjouit le public du Théâtre de l'Athénée grâce aux Frivolités Parisiennes.

Monsieur Patarin est un bourgeois tout ce qu'il y a de « chic ». Pensez-donc, il dîne chez Guitry et donne des bals « gallo-romains » au faubourg Saint-Germain (nu) ! Il l'ignore encore : André Sartène, le peintre qui prépare son portrait, lui a pris sa maîtresse Nane et tombe amoureux de sa fille Colette. C'est le début d'un imbroglio amoureux, de ceux qui se tricotent dans les opérettes de l'entre-deux-guerres avec sa galerie de personnages :  les Patarin et leur fille, la « gosse de riche », la baronne qui « combine » pour récupérer quelque pourcentage sur telle ou telle affaire, mais sait préserver les apparences, le peintre coureur de jupons, la grue Nane et Léon Mézaize, embauché comme « mari de location » de Nane.

ravive l'esprit des années 20 dans une mise en scène actuelle mais non ostensiblement actualisée, prenant quelques libertés bienvenues avec le livret de Jacques Bousquet et Henri Falk : les domestiques Germaine et Hubert, superflus, sont ainsi supprimés. Suzanne Patarin, jusque-là cruche de service, prend sa revanche au dernier acte : ce retour féministe et très actuel est mis en avant par une intervention musicale inattendue et drôle. Enfin, le décor, plus minimal que dans le livret, fait ressortir le fil rouge qui traverse toute l'œuvre : notre rapport à l'art moderne. Les deux librettistes croquaient les bourgeois de l'époque : pour être chic, il faut aimer Picabia, Picasso, Erik Satie et Darius Milhaud, et danser la java et le fox-trott dans des caves. La mise en scène s'amuse quant à elle de notre regard sur l'art contemporain (la grande toile couverte d'un drap blanc, le carré unicolore, et la sculpture offerte par le maharajah). Le décor est d'ailleurs aussi dépouillé que les tenues sont excentriques et réjouissantes, de la tête aux pieds, soulignant les travers de chacun.

La musique est aussi le reflet de cette modernité, intégrant blues (septuor), fox-trott et chanson de music-hall, laissant l'opérette au passé. L'orchestre des Frivolités parisienne, en effectif réduit dans la fosse de l'Athénée, n'a pas besoin de direction, et participe au comique de l'ensemble, ici en chantant avec les acteurs, là en entamant un air breton de circonstance (tout le monde part en villégiature en Bretagne et le malheureux prétendant de Colette est le Vidame de Kermadec), décalé et hilarant : on a même sorti la bombarde pour l'occasion. Sur le plateau, chacun est un acteur impeccable dans son rôle et suit une chorégraphie d'ensemble à la fois précise, intelligente et virtuose. Les parties vocales sont à l'avenant. , tout aussi en voix que dans Coup de roulis, incarne le nouveau riche fat, tandis que , parfaite en potiche qui s'affranchit, fait briller sa voix franche et gouailleuse et se montre investie dans son rôle de grue.

La gosse de riche est . Pétulante et tendre, elle offre une délicate voix de colorature, qui prend un peu de temps à se chauffer. Les autres voix d'hommes sont également bien servies avec le baryton chaleureux et l'élocution très claire d' en peintre, et avec qui campe un Léon Mézaize à la voix bien pleine également. Mention spéciale pour en baronne Skatinkolowitz, qui se délecte du rôle (on pense un moment à l'actrice Jacqueline Maillan) et donne une voix bien colorée et présente. Comme pour le jeu, les ensembles vocaux sont très réussis, en particulier l'air du septuor entrelaçant les lignes mélodiques de chacun.

Après Yes !, Ta bouche (avec Les Brigands) et Là-haut (déjà avec ), on redemande du !

Crédits photographiques : © Camille Girault

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