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Les forces vives de la jeunesse aux Rencontres musicales de La Baule et du Pays Blanc

Le jeune festival baulois né il y a trois ans du « désir simple et puissant de rassembler et transmettre » tisse des liens intergénérationnels entre figures internationales et jeunes talents, proposant neuf concerts de musique de chambre sur la Côte d'Amour et dans la presqu'île guérandaise. 

Créé sous l'impulsion de Georges Zeisel, son directeur artistique, le festival soutenu par la Ville de la Baule comme un temps fort et pérenne de la vie culturelle bauloise s'est doté l'an dernier d'une académie confiée au violoncelliste , qui la dirige et l'anime. Sur les neufs concerts programmés, trois ont lieu sur la scène réhabilitée en 2023 du parc des Dryades, un endroit emblématique de la cité balnéaire. Ce sont les concerts des « têtes d'affiche », comme , fidèle depuis ses débuts, ou encore Pierre Fouchenneret et cette année. Les six autres concerts sont réservés aux programmes montés dans le cadre de l'Académie avec des œuvres abordées lors des masterclasses publiques, et arpentent diverses églises du patrimoine local. 

Le 12 juillet, le public se serre dans l'église Sainte-Thérèse de La Baule pour écouter de jeunes musiciens à l'orée de leurs carrières, finissant pour la plupart leurs formations dans les Conservatoires Nationaux Supérieurs. , parrain du concert, se joint à eux sur scène. Le « B » est à l'honneur, avec pour commencer une transcription pour trio à cordes de Dimitri Sitkovetsky d'extraits des Variations Goldberg de J.S. Bach (Aria – six variations dont la n°30 « Quodlibet »-Aria). (violon), Cassandra Teissèdre (alto) et Lynn Renouil-Hata (violoncelle) nous prouvent que quels que soient les instruments, à cordes ou à clavier, Bach reste du Bach, et colorent les parties de son contrepoint de leurs registres respectifs dans une belle écoute mutuelle, soulignant la légèreté du rythme pointé de la Variation n°7 et les frottements harmoniques de la Variation n°15. Beethoven ensuite, avec sa Sonate pour violoncelle et piano n°3 en la majeur op.69 par le duo . La jeune pianiste s'en empare avec une vigueur et une énergie peu communes sur un Steinway D qu'elle fait pleinement sonner, un peu sur-dimensionné pour le lieu. Très contrastée, traversée d'épisodes intempestifs, cette Sonate respire ici la vie et l'enthousiasme d'un Beethoven en pleine possession de ses moyens. C'est ce que le duo s'emploie à transmettre dans un jeu de part et d'autre très engagé, lumineux, captivant du début à la fin. Encore B avec Brahms, et une belle interprétation de ses Intermezzi opus 118 par , qui timbre et fait chanter généreusement son piano, dans un large ambitus de nuances. La soirée se termine sur le Quatuor pour piano et cordes n°3 en ut mineur op.60 de Brahms (« Werther ») , interprété par Laure, Céleste, Cassandra et François Salque : la pianiste donne le ton de l'allegro initial par la force d'impact de son premier accord. Suit une confrontation intense entre piano et cordes, parsemée d'éclats, qui laisse place à l'urgence haletante du scherzo. Le chant d'une beauté renversante du violoncelle de François Salque apporte un répit dans l'Andante précédant l'Allegro comodo final porté brillamment et dans un élan commun par les interprètes.

Le 14 juillet, il fallait oublier la retransmission télévisuelle de la fête parisienne pour assister au concert donné au parc des Dryades ! On attendait en duo avec dans Mozart, Beethoven et Brahms. Changement de programme suite à l'annonce de l'annulation du violoniste souffrant. Un nouveau concert est improvisé en dernière minute avec les musiciens de l'Académie et . Le temps est incertain, d'ailleurs il se met à pleuvoir juste avant le concert, tandis que le public est déjà installé dans l'amphithéâtre. Les forces vives réunies de l'Académie vont chasser la pluie dès les premières notes du premier mouvement de la Sonate pour alto et piano  op.120 n°2 de Brahms, joué par Cassandra Teissèdre et . Quel beau cantabile et quelle séduction dans leur jeu fluide et équilibré, entre intimisme et élans passionnés ! La soirée commence très bien…On savoure tout autant l'expressivité du violon de la jeune nommée révélation instrumentale aux Victoires de la Musique cette année qui rejoint François Salque et Guillaume Bellom dans le Trio pour piano et cordes n°2  op.87 de Brahms. Quel bel équilibre là aussi entre la présence du piano et le jeu fusionnel des cordes, très caractéristique de ce trio. Après son scherzo elfique, quasi mendelssohnien, l'allegro final nous emporte ici dans son vivant flux sonore. Le Quintette pour piano et cordes  op.44 de Schumann, réunissant , , , et Guillaume Bellom finit de nous convaincre que l'on n'aurait pu passer meilleure soirée ! Ce concert impromptu est une véritable réussite si bien que l'on reste incrédule quand les musiciens nous disent qu'ils se sont rencontrés pour certains pour la première fois ici, à la Baule ! Un élan spontané commun, une énergie et une fraîcheur inédites en sont les ingrédients. Chacun dans ce quintette a des choses à dire et trouve sa juste place, et tous regardent dans la même direction musicale, le piano de Guillaume Bellom structurant l'ensemble, en parfait garant de l'architecture de l'œuvre. Excellent et fin musicien, il est décidément un« chambriste » accompli. 

Un grand coup de chapeau à l'ensemble de ces artistes pour leur réactivité, capables d'un tel résultat musical au pied levé, et à François Salque qui est l'artisan de cette belle cohésion. Et longue vie à ce festival dont la philosophie n'est pas que verbiage ! 

Crédit photographique : © Caroline Paux / Rencontres musicales de La Baule

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