Pour préparer leur tournée aux États-Unis, l'Orchestre national de France et Cristian Măcelaru reprenaient à la Philharmonie de Paris des œuvres d'Elsa Barraine et Maurice Ravel interprétées récemment, après avoir accompagné le jeune violoniste américain Randall Goosby dans le Concerto de Tchaïkovski.
Pour une tournée de quelques jours aux États-Unis début novembre achevée à Carnegie Hall, l'ONF s'est préparé à des acoustiques différentes de son Auditorium de Radio France en jouant le dernier concert d'octobre à la Philharmonie de Paris.
Pour l'occasion et non compris dans la tournée – prévue avec Daniil Trifonov -, le jeune violoniste Randall Goosby était l'invité de la première partie, exclusivement consacrée au Concerto pour violon de Tchaïkovski. Avec un hall plein à craquer d'un public jeune en demande de tickets de dernières minutes, sans doute pour le jeune musicien et sa première apparition officielle en France.
Très souriant, Goosby est même parfois sautillant et n'hésite pas à se trémousser lorsqu'il ne joue pas de son magnifique Stradivarius « ex Strauss » de 1708. Mais lorsqu'il s'agit d'utiliser l'archet, on sent une application à bien faire et à réussir à bien détailler toutes les notes qui n'a rien à voir avec un grand jeu soliste. Totalement dénuée de nuance, cette prestation n'est pas désagréable en soi, les quelques rubatos ou accentuations surprenants de l'Allegro moderato n'étant jamais agaçants. Restant semble-t-il dans son univers et sans vraiment faire attention à l'orchestre (ce qu'on retrouve exactement sur une vidéo YouTube de 2023 avec Louis Langrée), l'Américain offre un mouvement lent plutôt agréable. Mais son manque de variation et le fait qu'il ne propose rien de plus que les notes écrites dans la partition ne permettent pas de faire grand-chose de la cadence, ni de toute la seconde moitié du premier mouvement.
Pris en défaut par une technique qu'on juge supérieure chez la première violon du soir -une Sarah Nemtanu qu'on reverra souvent à cette place à partir de 2026, puisqu'elle prend le poste à l'Orchestre de Paris -, Randall Goosby tente en permanence de jouer tout exactement comme il faut dans le Finale, seulement aidé par l'accompagnement attentif de Cristian Măcelaru. On passera sur un bis lui aussi bien peu enflammé, tant le soliste de 29 ans veut tout bien jouer de la partition, plutôt que bien jouer avec elle, d'un Louisiana Blues Strut de Coleridge-Taylor Perkinson sans rapport avec le concerto russe juste avant.
En seconde partie, le National et son directeur musical jusqu'à la fin de la saison reprennent la Symphonie n°2 d'Elsa Barraine dont nous avions déjà parlé l'an passé. Ce soir, la prestation est globalement la même, facilitée par les couleurs françaises des mouvements extrêmes qui semblent encore aujourd'hui manquer d'unité par rapport au mouvement lent médian. La Suite n°2 du Daphnis & Chloé de Ravel est évidemment bien plus géniale. Mais si l'orchestre montre qu'il est sans conteste l'un des meilleurs au monde pour jouer cette œuvre, tant le poids de la tradition ressort de chaque instant, le manque d'adaptation à l'acoustique de la Philharmonie rend souvent les équilibres très problématiques. Introduite avec des premiers violons inaudibles au début, la suite se poursuit avec des cuivres trop forts, et surtout un célesta très mal placé à droite, juste devant les contrebasses.
Là encore, on aurait pu se passer du bis tant il est anecdotique, Cristian Măcelaru voulant faire honneur à sa patrie avec Hora mărțișorului de Grigoraș Dinicu orchestré par Dan Dediu. Espérons qu'il saura le remplacer par l'une des Rapsodies Roumaines d'Enescu à New-York.