Vainqueur de la première édition du premier concours international de composition à destination du jeune public imaginé par Thierry Weber, Jean-François Verdier et l'Orchestre Victor Hugo, Momo, l'enfant-pêche vient d'être créé à Besançon.
En décembre 2024, lors de la finale du concours, le jury jeune public avait massivement voté pour Voyage au centre de la Terre d'Ezechiel Spucches. Mais c'est à Momo, l'enfant-pêche d'Haru Shionoya que le jury de professionnels attribua la récompense suprême. Haru Shionoya a depuis terminé son œuvre dont les vingt minutes entendues en 2024 avaient servi de bande-annonce à un nouveau conte musical qui, dans sa forme définitive, en avoisine dorénavant cinquante.
La jeune compositrice japonaise y confirme sa sensibilité saariaho-debussyste au fil d'une œuvre davantage d'atmosphère que de réservoir à tubes. On songe aussi à Ravel, le voyage initiatique de Momo évoquant celui tricoté par Colette pour L'enfant et les sortilèges.
Manga et Roald Dahl compris, Momotarō, le conte japonais originel n'en est plus à une variante près. Avec Haru Shionoya et Louise Brun, Momo n'est pas un enfant mais une enfant. Guidée par une voix maternelle, Momo quitte la pêche voguant au gré du courant dans laquelle elle vit, pour partir, à la recherche d'un « ogre » qui s'avérera être son propre frère jadis banni pour sa différence.
On retrouve sur la scène de l'Auditorium Jacques Kreisler de la Cité des Arts de Besançon, cerné par vingt instrumentistes de l'Orchestre Victor Hugo dirigés avec tout l'impressionnisme requis par Lea Katharina Fischer, la mise en scène de Louise Brun dans la gracieuse scénographie d'Helen Hebert, agrémentée cette fois d'un sol en miroir pour figurer l'élément aqueux du livret.
Le public (formé en amont du lever de rideau par la compositrice elle-même) est mis à contribution pour accompagner à bouche fermée certaines étapes du parcours de Momo, mais aussi l'orchestre dont quelques membres animalisés viennent aider l'enfant dans sa quête : un Tromptissien (trompette/chien), un Altopithèque (alto/singe), un Coroiseau (cor anglais/oiseau). Fin heureuse pour tous avec le dernier mot d'un ‘Rentrons à la maison » final qui résonne à l'instar du ‘Maman' conclusif de la fantaisie lyrique de Ravel.
Brenda Poupard, récent merveilleux enfant ravélien, est aujourd'hui une Momo de rêve. L'impeccable intelligibilité (surtout une fois qu'elle a émergé de la pêche) de la jeune soprano française justifie presque l'absence des surtitres au fil de ce voyage qui ne va pas s'arrêter à Besançon puisque dix orchestres partenaires aux quatre coins de l'Hexagone ont été embarqués à bord de cette aventure lyrique dont le langage sophistiqué s'adresse aussi aux ex-enfants.