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Olivier Py ouvre une très joyeuse Cage aux folles au Châtelet

adapte en français La Cage aux folles, célèbre musical de Broadway inspiré de la pièce de . La nouvelle production proposée au Théâtre du Châtelet est une absolue réussite, avec un phénoménal dans le rôle de Zaza.

Dès le premier tableau, le ton est donné, avec une chorus line de douze danseurs baptisés les Cagelles qui s'alignent pour le premier numéro de la revue de La Cage aux folles, ce cabaret de la Côte d'Azur, perle de Saint-Tropez. Cet impressionnant aéropage de danseurs travestis en danseuses est l'une des réussites de ce spectacle formidable inspiré de la pièce de 1976 de , et du musical de et Harvey Fierstein. Auteur classique de Broadway, et notamment des succès Hello Dolly ! et Mame !, a découvert la pièce grâce au film d'Edouard Molinaro avec Michel Serrault et l'a adapté en 1983 pour la scène new-yorkaise, en y ajoutant musique et chansons sur un livret de Harvey Fierstein intégrant le contexte politique et militant de la communauté homosexuelle américaine de l'époque. Ce fut un succès, jamais démenti depuis.

50 ans après sa naissance, La Cage aux folles revient à Paris dans une nouvelle production du Théâtre du Châtelet en accord avec les Visiteurs du soirs, avec un texte traduit et adapté par qui retrouve le ton de Poiret et l'actualise avec les enjeux contemporains de l'homoparentalité, de l'affirmation de soi et de la fierté homosexuelle. Sans temps mort et avec une fluidité naturelle, il coud ensemble les scènes théâtrales, les parties dansées et les chansons, dont beaucoup sont devenues des standards. Il en résulte un spectacle enlevé, très drôle, ultra dynamique mais aussi très émouvant, visible par tous les publics.

, qui signe aussi la mise en scène, est accompagné de son équipe artistique habituelle, avec une astucieuse scénographie de , jouant sur toute la hauteur du cadre de scène. Comme à Broadway, les loges en coursive des Cagelles sont superposées et dotées de murs de brique, le tout étant monté sur une tournette qui dévoile une scène et le décor d'un appartement dans le style extravagant des décorateurs stars du faubourg Saint-Antoine à Paris. Alors que tous les changements se font à vue, beaucoup de choses se passent backstage et dans une ruelle à l'arrière du théâtre, flanquée d'un café typiquement parisien. Au milieu du plateau, la scène resplendit de mille feux, avec un cadre et des marches ponctuées d'ampoules, comme un miroir de maquillage géant.

La gageure, outre la dimension « revue » qui occupe une partie du spectacle, était d'assurer une transition fluide entre les parties parlées, dansées et chantées. La première chanson d'Albin, alias Zaza, alias , qui se transforme sous nos yeux en meneuse de revue fardée et pailletée, dévoile dans « Un peu plus de mascara » une belle voix très grave. Le rôle du fils Jean-Michel, confié au ténor léger (un habitué du répertoire des comédies musicales), est parlé et chanté, et sa fiancée danse dans une séquence très proche des comédies musicales américaines. On aime aussi beaucoup « C'est ma vie » ou « Nos pas dans le sable », (une chanson nostalgique de Georges, le compagnon d'Albin), interprétées par le ténor dans le style opérette des années 30. L'ensemble du casting est par ailleurs excellent, du régisseur du théâtre aux tenanciers du bistrot, en passant par Jacob, le maître d'hôtel (impayable Emeric Payaet), le choeur et les figurants.

Olivier Py maîtrise parfaitement le format cabaret, comme il l'a prouvé dans sa carrière et son propre tour de chant, Miss Knife. Il y ajoute, dans La Cage aux folles, la dimension music-hall, où, dans des costumes (également signés ) de plus en plus extravagants au fil des numéros, Zaza se lance dans un french-cancan endiablé avec les Cagelles. Olivier Py a trouvé en l'interprète parfait pour cette comédie musicale, et celui-ci étincelle littéralement sous les strass, les plumes et les paillettes. Avec des intermèdes dansés, un tango notamment, entre deux numéros de Zaza, accompagné de l'orchestre de La Cage aux folles, Olivier Py rend remarquablement justice au très bon texte de , à l'instar de la chanson titre « La Cage aux folles ».

L'intrigue se corse – et c'est là que la comédie musicale rejoint la pièce -, quand Jean-Michel, fils d'un premier lit de Georges, mais élevé aussi par Albin, souhaite se marier avec Anne, fille d'un député ultra-conservateur. Sur le grand escalier, Zaza accuse le coup de sa présence indésirable au dîner de rencontre avec les parents d'Anne. Il faut dire que Edouard Dindon a pris la tête d'une « manif pour tous », allusion directe aux manifestations de 2012 contre le mariage entre personnes de même sexe, avec le slogan « un papa une maman »… « J'ai le droit d'être moi » (I Am What I Am) est une magnifique chanson sur l'affirmation de soi et la fierté homosexuelle (Gay Pride) avec un arc-en-ciel lumineux qui clôture cette très riche première partie.

La seconde s'ouvre avec la très célèbre scène « Prends ta biscotte » où Laurent Lafitte, digne héritier de Michel Serrault ,est absolument hilarant. Après la chanson « Cet amour-là », bouleversante, « On ne vit qu'une fois » (The best of times is now) réunit tout le monde au restaurant Chez Jacqueline, avec un émouvant hommage aux malades du sida, représentés par un homme en tee-shirt d'Act Up. Jusqu'à ce que les parents d'Anne découvrent le pot aux roses ! Face à leur réaction outrée, Anne réaffirme son amour pour son fiancé et le jeune Jean-Michel reprend la chanson « Cet amour-là » pour évoquer son amour filial pour son deuxième père, qu'il appelle « sa mère ».

Le dernier numéro est le bouquet final, sur le mode du « l'ai-je bien descendu » qui, du haut en bas du grand escalier, voit s'opérer la métamorphose des Dindon père, mère et fille, avec une revue digne du Moulin Rouge ou du Crazy Horse, qui fait de La Cage aux folles le parfait spectacle de fin d'année !

Crédits photographiques : © Thomas Amouroux / Théâtre du Châtelet

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