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La Forza del destino à Liège…

Avec des moyens financiers modestes à l'échelle internationale, l'Opéra Royal de Wallonie propose une politique artistique ambitieuse. Il affiche, cette saison, plus de productions que le théâtre royal de la Monnaie et le Vlaamse opera d'Anvers et Gand.

Cette scène régionale n'hésite pas à monter des ouvrages prestigieux et difficiles comme Don Carlos, Tännhauser, Les Huguenots, sans oublier, depuis 2002 et pour la première fois à Liège, un Ring de très haute tenue artistique. Le directeur actuel, le Monégasque fait fréquemment appel à des artistes de réputation comme , , ou .

La Forza del Destino est un opéra célèbre mais assez rare qui draine sans problème un large public international. Suite au décès inopiné du metteur en scène Bernard Brocca, la reprise est assurée par Claire Servais, une fidèle de l'ORW. Sobriété est le maître mot de cette direction d'acteurs qui sert la musique à défaut d'être particulièrement imaginative et innovante. Des décors sans ostentations, des lumières judicieuses, des costumes efficaces et une habile utilisation du vent comme écho au destin complètent cet ensemble. Si certains moments tournent un peu à vide, d'autres, comme le dernier acte, s'avèrent dramatiquement intenses. Notons juste une étrange manie de faire mourir les personnages debout ! Si la première distribution programmée semble avoir reçu un bel accueil, la deuxième distribution, en piste ce dimanche, amène de sérieuses réserves. Deux chanteurs dominent les évènements : la basse polonaise, fidèle et star de l'ORW qui campe un Padre Guardiano noble et souverain et le jeune baryton belge en Fra Melitone. Dans ce rôle aux accents comiques, le lauréat belge du dernier concours musical Reine Elisabeth fait merveille : le timbre est magnifique, le chant est stylé et la prestance scénique exceptionnelle. Maurizio Clementi possède le charisme pour Don Alvaro, mais son timbre grisâtre n'est pas très approprié ; alors qu'en Don Carlo di Vargas, déçoit. Sa présence physique peut faire illusion, mais ce chanteur qui n'a plus l'âge du rôle chante souvent trop fort pour faire oublier une technicité à la dérive.

La Leonora de Thérèse Waldner est problématique : la puissance vocale fait forte impression, mais la technique est très souvent défaillante et le timbre métallique douloureux pour l'oreille. Pourtant l'engament dramatique est incontestable et au cinquième acte, soudainement transfigurée, elle nous offre un sublime Pace, pace, mei Dio !. Quant à Ana Maria Di Miccio, elle manque cruellement de projection pour une Preziosilla. Au finale, des chanteurs expérimentés qui devraient faire attention à ne pas chanter tout et n'importe quoi, au risque d'y perdre toute personnalité.

La direction du chef français Alain Guingal ne fait pas dans la finesse, mais elle sait animer le discours et maintenir une tension tout au long des cinq actes. L'orchestre de l'Opéra de Wallonie confirme sa constante progression : cordes homogènes, vents fruités et cuivres précis. Le chœur, relégué à un rôle secondaire, est lui aussi en grande forme et affirme le haut niveau des formations chorales opératiques de Belgique.

Crédit photographique : © Opéra Royal de Wallonie

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