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Routine

La renommée musicale de Namur se fonde essentiellement sur le chant choral et sur la musique baroque, mais le Philharmonique ne néglige pas pour autant le répertoire symphonique, accueillant chaque saison un grand orchestre au Théâtre royal. Invités cette année, l' et son chef , accompagnés par le violoniste Sergei Katchatryan, vainqueur du dernier Reine Elisabeth.

Pièce principale du programme, une symphonie Eroica qui ne restera pas dans les mémoires, et qui n'a fait que confirmer la réputation inégale du chef finlandais qui aborde le premier mouvement avec une élégance salonnarde et une absence de poids et de tension qui laissent rêveur. nous présente un Beethoven fluet et souffreteux, sans force ni élan. L'attitude corporelle du chef, que nous avons pu observer lors de plusieurs concerts auparavant, est révélatrice. Pas question pour nous de lui reprocher de diriger assis, son genou le fait souffrir, et il doit le soulager en restant assis sur un tabouret la plupart du temps. Ce handicap est une lourde contrainte pour lui, mais ne le diminue pas en tant que chef, et les exemples de grands chefs dirigeant depuis une chaise sont nombreux. Le problème ne vient pas de ce qu'il se lève et se rassoit très souvent, mais de tout le reste : il remonte son pantalon, ajuste son col, remet sa mèche en place, se mouche, s'éponge, compte les feuillets restant de la partition, … en bref, il chipote de la main gauche et bat la mesure de la main droite, et semble à maints endroits s'ennuyer ferme. Entre ces longs tunnels de morosité, il y a de beaux passages, ceux qui l'intéressent et qu'il dirige enfin avec attention, car est quand il le veut bien un très bon chef, capable d'obtenir de son orchestre des nuances très fines, des phrasés soignés et subtils, et un réel engagement. On retient les plus beaux passages : le deuxième mouvement dans son ensemble, puissamment contrasté et très investi, l'énergique début du Scherzo, ainsi que la coda du dernier mouvement. Le reste du temps, sans que ce soit jamais mauvais (Mikko Franck sait tenir ses troupes), c'est l'indifférence maussade qui prévaut, et il y a de quoi se poser des questions quand on voit un chef sembler s'ennuyer de la sorte en dirigeant non pas l'œuvre d'un obscur petit maître, mais l'acte fondateur de la symphonie moderne.

Auparavant, on aura entendu Sergei Khachatryan très inspiré dans un très beau concerto de Bruch, mené avec lyrisme et panache, et faisant preuve d'une virtuosité assez décoiffante dans le final, bien accompagné par un orchestre très attentif, au romantisme généreux et enthousiaste.

Le concert a débuté par Einklang, d', une partition primée au projet « Tactus » 2005. Cette œuvre est une sorte de tout-venant contemporain, guère désagréable à entendre, mais dont on a oublié le début avant même que la pièce se termine, alignant les poncifs et les effets rebattus : gros effectifs, orchestration spectaculaire, ambiance lunaire vaguement science-fiction, et cela va de soi, pas la moindre petite mélodie à laquelle se raccrocher. En ouverture de concert, et face à un public aussi dissipé que celui du Théâtre de Namur ce soir-là, Einklang a peu de chances de plaire.

Crédit photographique : © Heikki Tuuli

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