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Juan Diego Flórez remplacé par Marc Laho dans Don Pasquale: déception, mais pas trop

« Juan Diego Florez étant souffrant le rôle d'Ernesto sera chanté par . » Dès les portes du théâtre, on est confronté avec la nouvelle décevante que confirme, avant le début de la représentation, le directeur, .

A 12 heures 30, Florez avait annulé la soirée, le remplaçant n'était arrivé au théâtre qu'à 18 heures 35. Déception certes, mais qui ne dure pas trop longtemps. C'est que nous assistons à une représentation tellement réussie, tellement dans l'esprit de Donizetti…

Commençons, pour une fois, par la mise en scène. Dans la grande tradition de , nous livre un spectacle extraordinaire, léger et pathétique à la fois, plein de fantaisie et d'ironie, drôle, mais jamais exagéré, respectueux du texte et de la musique. Ajoutez à cela des décors et des costumes à faire rêver et vous vous trouvez au septième ciel.

Au pupitre, on retrouve le grand Nello Santi qui connaît cette musique comme peu d'autres, qui trouve le tempo juste à tout moment, qui interprète avec brio et verve cette partition sans pour autant négliger les moments élégiaques. Santi respire avec les chanteurs, il sait ce qu'apporte un tout petit rubato par-ci et une fioriture par-là sans lesquels cette musique deviendrait mécanique et froide.

Sur scène, campe un Don Pasquale débordant de vitalité, rude et têtu, et néanmoins fragile et aimable, dont les compagnons les plus chers sont des ours en peluche. Vocalement, Raimondi est en grande forme. Sa voix est toujours imposante, l'aigu est facile et, malgré tous les Scarpia, Jago et Boris, il ne rencontre aucune difficulté dans les passages rapides et le canto sillabato du duo avec Malatesta. Isabel Rey est la plus ravissante Norina que l'on puisse imaginer, qui porte avec chic les différentes robes de la soirée, aussi raffinée scéniquement que vocalement, aux vocalises étincelantes et précises, faisant ainsi oublier quelques stridences dans le registre aigu. Le docteur Malatesta est chanté par Oliver Widmer, un habitué de l'opéra de Zurich. Si le timbre est plutôt raide et sec, il semble avoir travaillé son aigu et peaufiné son legato. Et sur scène il est tout juste irrésistible.

Et le pauvre remplaçant, arrivé au théâtre une petite demi-heure avant le début du spectacle ? Dès son premier air, a été accueilli cordialement par le public de Zurich – et avec raison. Certes, on ne peut attendre de lui la virtuosité de Florez et la qualité tout à fait unique de son timbre. Mais Laho possède une jolie voix et une technique sûre qui lui permettent de triompher sans aucun effort de la tessiture tendue du rôle, et de nous offrir de très belles demi-teintes. L'aigu manque de l'arrogance de Florez, mais il est absolument sûr, de sorte que Laho ose même le do dièse suraigu à la fin de sa cabalette. Enfin il est bon acteur et s'intègre facilement dans la mise en scène dont il avait fait connaissance à Madrid en 2004.

A la fin, le public ovationne les chanteurs, le chef et l'orchestre – et la déception est presque oubliée.

Le 2 janvier enfin, malgré un rhume persistant, Juan Diego Florez a pu assurer la représentation. Très prudent, il a renoncé à la cabalette de son grand air et aux aigus ajoutés, en fascinant tout de même par la beauté de son timbre, par son savoir-faire technique et par son chant nuancé.

Crédit photographique : © Suzanne Schwiertz

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