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Méhul : L’emporté

Avec cette parution d'un opéra en un acte de Méhul, on espérait en savoir un peu plus sur ce compositeur qui n'est plus guère connu que par le Chant du départ, et sur une époque, la fin de la révolution française et le début de l'empire napoléonien, qui n'est certes pas la plus foisonnante sur le plan musical, mais dont certains compositeurs se révèlent néanmoins fort intéressants. Hélas, il s'agit d'un pastiche d'opéra italien, créé dans des circonstances assez rocambolesques.

Napoléon, qui aimait l'opéra italien, et qui fut à l'origine de son intégration définitive dans le paysage musical français, jusqu'ici plutôt réfractaire, reprocha à Méhul de ne pas savoir écrire de musique italienne. Celui-ci ne répondit rien, mais quelques mois plus tard, fût donné à l'Opéra-Comique, alors installé salle Favart, une soi-disant traduction d'un opéra italien créé une quinzaine d'année auparavant par un certain Fiorelli, l'Irato, en français : l'Emporté. L'œuvre obtint un beau succès, on acclama l'auteur…qui bien sûr n'était autre que Méhul !

Plus de deux cent ans après, que reste-t-il de ce gentil pastiche ? Une jolie musique, sur laquelle on sent planer plus d'une fois l'ombre de Mozart, parfois même cité note pour note dans le grand air de Scapin qui décrit les différentes formes musicales ; Un livret dont le fond est la tradition même, relatant les mésaventures d'un couple de jeunes amoureux contrariés par un vieux barbon et qui seront sauvés par leur valet Scapin, mais qui se gausse des conventions d'époque, en les mettant clairement à jour en un élégant second degré.

La forme est celle de l'opéra-comique, alternant airs chantés et dialogues parlés. Bien que rien ne soit mentionné dans la plaquette d'accompagnement, on suppose que les chanteurs ont été doublés par des acteurs, au moins pour le Scapin de , qui possède quand il chante un accent à couper au couteau. Scapin (le valet) Pandolphe (le barbon) et Isabelle (la jeune première) sont chacun dotés d'un grand air, Lysandre (le jeune premier) se voyant quant à lui gratifié de couplets, alternant parlé et chanté à l'intérieur du même morceau fermé. Une ouverture, un duo, un quartette, un trio et un finale complètent l'ensemble.

Sur le plan de l'interprétation, le niveau est très inégal. L'orchestre, sous la direction de , peut se révéler brillant dans les parties instrumentales pures, l'ouverture, ainsi que l'ouverture du Ballet de Pâris à Grand Orchestre qui complète le CD, et terriblement mou quand il accompagne les chanteurs. (Scapin) handicapé par la langue française, manque de vivacité, transformant son grand air en un océan d'ennui. (Pandolphe) possède un je-ne-sais-quoi de (c'est un compliment), (Isabelle) est toujours aussi charmante, (Lysandre) élégant, et (Balouard) tout à fait en situation.

On ne pourra conseiller l'achat de cette agréable œuvrette qu'aux collectionneurs d'opéras-comiques, à condition qu'ils ne s'attendent pas à y trouver l'imagination d'un Grétry ou d'un Dalayrac.

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