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La Fille du Régiment avec Juan Diego Flórez

Opéra-comique beaucoup apprécié des directeurs de théâtre et du public, la Fille du Régiment joue d'une réputation d'œuvre au sujet léger, et qu'il faut inexorablement tirer uniquement vers le burlesque, le futile.

La démarche d' de situer le début de l'opéra durant les derniers jours de la Seconde Guerre Mondiale permet de conférer plus de vraisemblance aux spectateurs d'aujourd'hui, pouvant se figurer l'urgence de l'amour en situation de crise. Il revient à un cadre plus traditionnel dans le second acte, avec des figurants attachants, une ambiance un peu plus loufoque, et plus attendue avec les hilarants moments qu'offrent la leçon de chant, ou l'attachant trio « Tous les trois réunis ».

Dans le répertoire comique, ou tout du moins léger, il faut un certain envol de la part des interprètes pour que l'intrigue nous passionne. Comment alors ne pas fondre devant la délicieuse  ? Elle possède tout d'abord l'abattage vocal, la légèreté d'esprit du personnage. Mis à part quelques aigus un peu tirés, la voix est superbe, livrant l'émotion si difficile à restituer de « Il faut partir » ; juste après le morceau de bravoure des neuf contre-ut du ténor enflammant théoriquement le public, il est ardu de passer à un air plus élégiaque. Le legato de Mlle Ciofi est alors là à son comble, et que l'on a plaisir à retrouver aussi parfait dans l'aria finale, « Quand le destin ». La leçon de chant du début du deuxième acte est d'une drôlerie irrésistible : l'exaspération de Marie est maximale, elle chante faux, et c'est peut être la première fois que l'on se délecte des fausses notes d'une chanteuse !

Son partenaire, , qui transporte un peu partout dans le monde son Tonio, est un artiste immense, nous le savons tous, surtout quand il galvanise les foules avec « Ah, mes amis, quel jour de fête » (jusqu'à devoir ici le bisser). Cependant, ce n'est pas avec ce morceau qui constitue le bis principal de tous ses récitals et concerts qu'il emporte l'adhésion. Nous prenant de court avec « Pour me rapprocher de Marie », Florez nous rappelle la filiation belcantiste de l'opéra, certes composé pour la France, mais avec cette réminiscence de la mélodie de l'école italienne. Livrant une belle leçon de chant avec un souffle toujours sous contrôle, une jeunesse vocale qui émoustille, et un art de la mezza voce convaincant, il confirme qu'il est désormais dans la cour des titulaires du rôle, en assumant aussi bien la virtuosité de l'aigu que la beauté de la ligne. Un Tonio que l'on peut voir cette saison dans de nombreuses villes européennes, que l'on ne peut résister d'aller voir sur le vif. La Duchesse de Crakentorp est pleine de truculence et participe activement à la vivacité de la représentation.

La direction frétillante de n'enlève malheureusement pas la routine du chœur, dont on ne comprend un traître mot, mais ne boudons pas notre plaisir, la fête est au rendez-vous avec ce DVD, qui est de plus agrémenté d'un documentaire interrogeant les acteurs sur la conception du rôle, ses difficultés, ainsi qu'un petit film qui nous fait visiter le superbe Teatro Carlo Felice de Gênes.

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