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Réussite contrastée entre symphonique et concerto

et

Intéressant programme mariant deux pièces célèbrissimes avec une œuvre peu connue d'un compositeur allemand mort à 28 ans sur le front de Galicie le 29 septembre 1915. Sans être un chef d'œuvre, cette Musique pour orchestre « en un mouvement » qui date de 1912 – et qui est la deuxième œuvre symphonique du compositeur – s'écoute avec plaisir et intérêt, grâce à une belle introduction lente et sombre, fort bien réussie par les interprètes, qui capte d'emblée l'attention. Différents épisodes se succèdent ensuite, au style un peu disparate, il faut bien l'avouer, avec de multiples influences – pas si straussienne que ça d'ailleurs, sauf à la toute fin – que l'auditeur peut deviner ça et là. Jamais avant-gardiste ni choquante, pas réellement surprenante non plus, assez facile d'accès, bien illustrée par le chef et un bon ONF, la fatalité a rendu sans suite cette œuvre prometteuse. avait déjà fait découvrir un autre compositeur allemand bien peu connu en France, Karl Amadeus Hartmann.

Le Concerto pour piano n°3 de Beethoven n'apportera pas exactement toute la satisfaction souhaitée. Faute partagée entre chef et pianiste, et dès les premières mesures. L'introduction orchestrale de l'Allegro con brio initial, qui donne le ton (en principe) du concerto, a été jouée bien neutre, sans élan, sans réelle tension. Normalement elle place l'interprétation sur orbite, mais cette fois ci, elle n'a jamais décollé. Le pianiste suit la même voie, articule bien au détriment de la puissance, de l'animation du jeu, finalement de l'expression. Il y a quand même plus à faire avec cette œuvre. Le Largo qui, comme son nom l'indique, est un mouvement lent, voire très lent, doit néanmoins rester expressif, capter l'attention, et atteindre des sommets de poésie ! Très lent, il le fut, mais pour le reste nous a laissé sur notre faim. Point de temps poétiquement suspendu, par exemple le passage sans thème où le piano fait des arpèges accompagnés par une flûte et un hautbois jouant quatre simples notes et quelques pizzicati de cordes, matériau technique réduit au minimum mais musicalement un sommet qu'il faut tenir une bonne minute, s'est transformé ce soir en tunnel interprétatif. Le Rondo final, bien que réalisé sur la même lancée, posera moins de problèmes (comme toujours pourrait-on dire) et sera le meilleur moment de cette interprétation.

En bis, Alexei Volodin nous a l'Impromptu n°3 en sol bémol majeur op. 90 de Schubert dans un style objectif et articulé.

Ainsi parlait Zarathoustra de , poème symphonique à l'introduction célèbrissime, est une pure jouissance auditive quand il est réussi, et un authentique morceau de bravoure pour tout orchestre qui s'y frotte. Car Strauss y a mis de nombreux pièges qu'il faut éviter pour réussir son coup : rester noble et grandiose sans être pompeux, soigner les transitions entre les épisodes et la progression à l'intérieur de chaque épisode, et surtout ne pas perdre la ligne musicale dans les grandes envolées orchestrales qui peuvent rapidement tourner au capharnaüm. Pari presque réussi, l'exécution globalement maîtrisée par le chef et un National en forme, jamais lourd, a manqué d'un peu de puissance, les cordes n'ayant pas toujours pu donner le coup d'archet décisif au sommet du fortissimo (bien peu d'orchestre y arrivent, mais quand c'est réussi, c'est génial !). On a bien aussi perdu une ou deux fois la ligne musicale, sans que cela ne tourne au à la foire d'emppoigne mais juste à un flou passager. Jouer un Zarathoustra parfait voudrait dire être dans le top five des orchestres mondiaux, ce qui n'est encore le niveau du National. Tout au long de l'œuvre le chef a su enchaîner et contraster les épisodes successifs, jusqu'à l'extinction des trois ultimes pizzicati ppp des violoncelles et contrebasses.

Crédit photographique : © Barbara Frommaan

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