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Pascal Dusapin : Faustus, où est ta victoire ?

Faust à l'envers, voilà ce qu'a voulu . Loin de l'image romantique véhiculée par Gœthe, Faust n'est pas une victime expiatoire de la faiblesse humaine.

Il mène avec ou contre Méphisto un jeu de pouvoir, perturbé par les apparitions de l'Ange, forme éloignée de conscience intérieure, de Sly, symbole du plaisir et de Togod, sorte de Dieu un peu trop humain. L'inspiration a été prise à la source, celle du récit anonyme du XVIe siècle contant l'histoire de , dit Doktor Faustus, reprise par Christopher Marlowe.

Comme à son accoutumée, met avant tout en exergue les tourments intérieurs des personnages principaux. Ces lapins géants, peluches à taille humaine, s'ils rappellent le fantasme enfantin de luttes manichéistes (qui n'a pas joué aux gendarmes et aux voleurs ?), ne nous amènent pas avec leurs mines renfrognées dans un monde merveilleux. Le plaisir de Sly, personnage échappé de la Mégère Apprivoisée de Shakespeare, est celui de la dépravation. L'immense horloge, symbole évident du temps qui passe et que les deux personnages principaux manipulent, reste le lieu principal de l'action. Une action excessivement physique, les chanteurs sautant, bondissant, roulant ou glissant d'une aiguille à l'autre de cet immense cadran. Une performance physique à saluer d'autant que les voix sont mises à rude épreuve par Dusapin. Constamment sollicités, Faustus et Mephistopheles ne quittent pas un instant la scène. L'Ange, unique rôle féminin tenu par l'excellente , reste toujours dans des hauteurs vocales stratosphériques. Si les monologues et le chant-parlé sont privilégiés, les quelques ensembles sont d'une difficulté redoutable de mise en place.

L'orchestre, autre premier protagoniste de l'œuvre, ne chôme pas non plus. Si d'un opéra à l'autre Dusapin varie ses points de vue (théâtre musical pour Roméo et Juliette, souvenir du « grand opéra » avec Perelà et ici, théâtre de l'expression et de la distanciation), son écriture instrumentale varie peu, pour notre plus grand plaisir. , jeune chef d'orchestre américain au répertoire éclectique, défend avec conviction une partition qui, à n'en pas douter, va se hisser aux cotés des Trois Sœurs d'Eötvös ou du Wintermärchen de Bœsmans : un classique du renouveau lyrique de ces 15 dernières années.

Article sur la création française de Faustus, the last night :

Faustus, the last night de Pascal Dusapin : Méphisto fêlé?

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