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La Ruhr fête les Bostoniens et Berlioz

La saison 2007/2008 de la Philharmonie de Essen est placée sous le signe de la France. «Voilà la France !» est le titre d'une programmation spéciale qui présente à la fois des œuvres françaises et des interprètes venant de l'Hexagone.

Pour l'ouverture, est à l'affiche avec sa Damnation de Faust. Cette fois pourtant, les interprètes ne sont pas français. En effet, le concert s'inscrit également dans un autre cycle intitulé «The Big Five» qui est consacré aux cinq «majors» parmi les orchestres américains. Et la Philharmonie est particulièrement fière d'accueillir pour la première fois à Essen le célèbre .

Les attentes sont donc grandes ; fort heureusement, nous n'avons pas été déçus. La technique sans failles des musiciens, l'homogénéité des pupitres et le son à la fois flexible et brillant démontrent en quoi le BSO compte parmi les meilleurs orchestres du monde. Au pupitre, nous retrouvons avec joie dont nous connaissons l'affinité avec la musique de Berlioz. Il nous offre une lecture vibrante d'énergie, mais jamais superficielle. Il sait au contraire alterner fougue et douceur, moments d'entrain et instants de pure poésie. Très en voix et très engagé, le Tanglewood Festival Chorus suit les intentions du chef, faisant ainsi oublier des ténors parfois un peu criards et une prononciation française généralement perfectible.

La distribution est dominée par le Méphistophélès d'anthologie de . Nous connaissons son diable élégant et cynique, maître de la diction et des nuances. Mais cela fait un moment que nous l'avons entendu dans une forme vocale aussi splendide. À ses côtés, est un Faust de grande classe. Si, par moments, les graves sont un peu sourds, il affronte sans sourciller la tessiture tendue du rôle. Il triomphe même du redoutable duo d'amour sans recourir une seule fois au falsetto. Mais nous sommes encore plus surpris par le savoir-faire stylistique d'un ténor qui fait sien, actuellement, le répertoire dramatique italien. Certes, il fait preuve de vaillance dans l'Invocation à la nature, mais ailleurs, il cherche constamment à alléger son émission, à placer haut sa voix et nous gratifie de superbes demi-teintes en voix mixte. Si le Brander de fait regretter la brièveté de son rôle, nous avouons une certaine déception face à la Marguerite d'. Le français est impeccable, la voix est ample et riche en harmonies, mais dès le haut médium l'émission devient serrée et les aigus sont désagréablement métalliques. «D'amour l'ardente flamme», cet air si émouvant, perd ainsi une bonne partie de son impact.

Ce petit bémol cependant ne réussit pas à troubler la fête. Le public d'ailleurs semble partager notre avis. S'il reste silencieux après l'air de Marguerite, il ovationne l'orchestre, le chef et les solistes à la fin du concert.

Crédit photographique : , & © National-Bank / Sfen Lorenz

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